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Première nuit
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Première nuit Les bruits nocturnes de la forêt nont rien dapaisant et Lucian est persuadé quil ne trouvera pas le sommeil. Tant dinterrogations demeurent présentent en lui. La voûte céleste faiblement éclairée par la lune sest libérée des lourds nuages qui pesait sur elle. Cette soudaine éclaircie est surprenante, mais pas pour déplaire au cadet. Dormir à la belle étoile sous une pluie battante na rien dagréable.
Le feu de Yann, sétouffant petit à petit, éclaire à peine les arbres alentours. Lil alerte de Lucian repère bientôt un mouvement du côté de la couche de Yann. Ce dernier se lève et observe les alentours. Drôle de façon dessayer de dormir. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Inquiet le jeune homme porta la main à son arme et mit un genou à terre prêt à subir lassaut de quelques bandits tapis à lorée du bois. Méthodiquement, il scruta le pourtour de la clairière sans rien déceler. Il dévisagea alors Yann dans lespoir de comprendre ce qui avait éveillé son attention mais la faible clarté déformait ses traits.
Anxieux il lui murmura : - Yann Que se passe-t-il ? Quavez-vous entendu ? La main serrée sur la garde de son épée, il attendait la réponse de son compagnon tout en jetant un rapide coup dil sur le passage menant à leur campement.
Alors que Lucian redécouvre le passage par lequel ils sont entrés dans la clairière, Yann ne peut sempêcher un sourire.
Rien mon jeune ami, rien du tout. Je ne pensais pas que tu tendormirais si vite. Dun bleu nuit au reflets argentés, le buisson est parfaitement immobile. Pourtant, instinctivement, Lucian sent que quelque chose ne va pas. Il y a autour de lui un je ne sais quoi que Lucian ne sattend pas à voir. Le cadet, fort dun enseignement basé sur lobservation et la compréhension, scrute attentivement chaque détail de la clairière. Le tapis dherbe moelleux se teinte dune légère couleur orangée aux reflets du feu de Yann. Les arbres alentours plongent leurs puissantes racines dans un sol fertile. La forêt a des allures bien vivante dans le noir. Lucian naperçoit plus la moindre branche morte, le moindre défaut des arbres. Les mouvements harmonieux de la cime des pins sylvestres accompagnent la douce brise qui flatte le visage du jeune homme. A lhorizon, le ciel garde encore les douces lueurs du soir Soudain Lucian comprend ce qui lui vaut cette sensation étrange. Son regard se porte à lest. Et le soleil sy lève plutôt que de sy coucher. Des reflets irréel teintent le ciel de pourpre, docre et de bronze. Quelques volatiles, réveillés par la compagnie des hommes senvolent, leur vol gracieux, ralenti au point dêtre presque figé réveille chez le cadet un sentiment de malaise. Le monde a perdu la tête. Les bruits de la forêt eux-mêmes résonnent comme dharmonieux instruments. Le bruissement des feuillages se poursuit tel une mélodie. Alors que Lucian se perd dans la contemplation et lécoute de ce monde étrange, la voix résonne en lui, comme si le voyageur était à mille lieues du cadet. Bienvenu dans le rêve, Lucian. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Le rêve
Tout ceci avait lair si réel, il ne sétait rendu compte de rien. A quel moment le voile des songes sétait-il écarté pour lui livrer passage ?
Les événements de la journée lavaient plongé dans le plus grand trouble, il se souvenait avoir eu du mal à trouver la quiétude nécessaire au sommeil et pourtant... Devant le panorama aux couleurs apaisantes, Lucian sétait levé, émerveillé par le sentiment de renouveau que lui insufflait ce décor et que toute imperfection semblait avoir déserté. Au fond de lui, il sentait comme un changement et redécouvrait cette sensation quil avait parfois ressentie lors de ses voyages en terre étrangère. Refoulée par sa curiosité naturelle, cette petite appréhension laissa bien vite la place à la fascination. Il se tourna vers Yann, sattendant presque à le voir différent sous les premiers rayons du soleil, auréolé de cette lumière féerique quarborent les divinités dans les peintures accrochées sur les murs des galeries royales. Inconsciemment, il se prit à le remercier de lui faire découvrir ce nouvel aspect de ses nuits. Son cur se mit à battre plus rapidement lorsquune pensée lui vint, dans quelques temps il lui serait possible de retrouver la jeune femme quil avait connue un an plus tôt... - Yann, jaimerais savoir une chose Lucian hésitait, comme si la réponse quil attendait allait lui fermer la porte de ses espérances. - Ces voyages Le jeune homme cherchait ses mots dans le chaos de ses émotions. - Tout ceci nest pas aussi simple quil ny paraît nest-ce pas ? Je suppose quun tel don doit avoir ses limites et ses règles non ? Lucian ne fixait plus son compagnon, son regard fuyant plongeait dans l'océan de feu qui embrasait lhorizon.
Yann laisse son regard flatter lhorizon, visiblement le rêveur ne se lasse pas de ces voyages nocturnes.
Oui et non lami. Aucune loi ne régit le rêve, juste quelques conventions. En fait, tout ce que tu fais peut avoir des répercussions dangereuses. Ainsi si tu viens à traquer ou à tuer un rêveur, ses amis risquent de te chercher et de chasser à ton tour. Dis moi ce que tu cherches, je te dirais si tu as une chance de le trouver. Mais saches une chose, tu es un cartographe, tu apprendras vite à trouver ton chemin, quel que soit le lieu où tu voudras te rendre. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Lucian paraissait hésitant, il réalisait tout à coup quil lui faudrait livrer une partie douloureuse de son passé. Les images se bousculaient et la vision du val dAndaines prit à nouveau forme devant ses yeux noyés de larmes.
Le Belgaryon fendait de ses eaux claires les vastes plaines verdoyantes qui sétendaient à perte de vue, ceintes par de majestueuses montagnes aux pentes fleuries. Mais au loin la fumée noircissait lhorizon, de la fumée aussi noire que le cur des hommes dans leurs accès de haine, épaisse et massive tel un géant éthéré. - Le capitaine Martal avait donné lordre daccélérer le pas. Lanxiété se lisait sur son visage, mais il avançait courageusement afin de maintenir au maximum le moral de ses hommes. Lacadémie nous avait envoyé pour superviser la signature du traité dalliance avec la province dAndaines. Je nétais quun simple novice parmi des vétérans, tâchant dobserver et découter pour parfaire ma formation A lapproche de la cité, nous sommes tombés sur une petite troupe de notables aux prises avec des pillards, enfin cest ce que nous avions cru sur le coup Le cadet marqua une pause, du revers de la main il essuya les larmes qui venaient de rouler sur ses joues. - Je voyais le sol prendre une teinte rougeâtre, je les voyais tomber les uns après les autres tandis que nous courions les rejoindre mais nous sommes arrivés trop tard. Les assassins étaient déjà en fuite, nous laissant avec les corps de ces pauvres gens, massacrés pour satisfaire quelques dignitaires floués dans lincessante course au pouvoir. Parmi les victimes nous avons découvert le conseiller Osrick, lambassadeur de notre roi, gisant dans son sang, la main refermé sur un bout détoffe aux couleurs du seigneur Lorth mon père Sa voix sétrangla. - Je fus immédiatement mis aux arrêts puis quelques semaines plus tard ce fut au tour de ma famille, nous étions tous accusés de trahison mais Lui avait pris la fuite. Chaque jour, les séances de torture reprenaient et sans lintervention de maître Nohlam, je croupirais encore dans ces maudites geôles. Chaque jour, sa fille adoptive venait panser mes plaies, chaque jour ses mots chassaient la noirceur de mon âme blessée. Elle était aussi douce que les ailes dun ange, souriante et généreuse Sa phrase nétait plus quun murmure. - Elle était tout pour moi mais encore une fois, le destin sest joué de ma piètre existence et me la ravie. Elle fut enlevée il y a peu durant mon voyage vers le prieuré dAsthrion. Il tourna vers Yann un regard emplit de tristesse où brillait cependant une petite étincelle despoir. - Le rêve peut-il me conduire à elle, peut-il me permettre de communiquer avec elle ? Dernière édition par lucian le Jeu 28 Juil 2005 03:34:10, édité 1 fois.
Yann posa la main sur lépaule du cartographe en signe de réconfort.
Ici rien nest impossible. Et puis, tu es un cartographe, lun des maîtres des chemins, ton destin est de guider, dexplorer et de trouver. Cela prendra peut-être du temps, mais je suis sûr que tu la retrouveras un jour. Dans le but évident de changer les idées à Lucian, Yann lui désigne un parchemin que le jeune cadet porte à la ceinture. Tiens, voilà ta carte. Jettes-y un il, tu comprendras mieux. Lucian sexécute et ouvre le parchemin. Il découvre sur la toile une multitude de petits dessins stylisés. Bien vite le cadet reconnaît la représentation simple du paysage alentour. Il sagit là dune carte des environs. Pourtant plusieurs symboles sont présent à divers endroits de la carte et ces symboles, Lucian ne les reconnaît pas. Le seul qui revête quelque sens pour lui est une illustration dun château. Pourtant de là ou il est, Lucian aperçoit fort bien lendroit représenté et il ny a nul trace de château là-bas. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Le jeune homme fixait le lieu indiqué par le parchemin, rien
Par quel prodige, lillustrateur de cette carte avait-il pu se tromper ? Une vision peut-être Oui, lhomme avait dû être le jouet dune quelconque hallucination Aucune armée, aussi puissante soit-elle, naurait pu rayer un tel bastion de la surface de la Terre sans laisser de trace. Ces édifices aux formidables défenses, fiertés de ces nobles en guerre perpétuelle contre leurs semblables, ne laissent jamais la nature alentour sans séquelle apparente et pourtant Etait-ce lun de ces fameux portails dont Yann lui avait parlé à plusieurs reprises ? Mais dans ce cas, pourquoi ne le voyait-il pas ? Cela navait aucun sens. Lucian se tourna vers son compagnon, fixant sur lui un regard interrogateur. - Que signifie ceci ? Que représentent ces étranges symboles et pourquoi la carte indique-t-elle un château là où il ny a visiblement rien ?
Yann semble toujours se complaire à entendre les interrogations des jeunes rêveurs.
Et bien, ta carte te désigne l'emplacement du portail qui mène au château... Et cela tombe bien car c'est là-bas que nous devons nous rendre... Et puis, ici, il faut se méfier de ce que tu vois... J'ai vu des maisons disparaître en une journée sans laisser la moindre trace... Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Tout ceci était nouveau pour Lucian et cela le mettait mal à laise. En théorie, daprès son compagnon, il était capable de déceler ces fameuses brèches qui lient le rêve à la réalité, il ny avait donc aucune raison pour quil ny arrive pas. Après une profonde inspiration, il savança en direction du lieu où devait se trouver le portail, finalement la distance qui les en séparait était peut-être lunique raison pour laquelle il ne voyait rien
Cette pensée lui insuffla un regain dassurance, encore trop faible pour calmer les craintes qui lassaillaient mais suffisante pour lui donner le courage daller de lavant.
Il se tourna vers Yann et lui sourit. - Eh bien ne perdons plus de temps, allons voir ce château de plus près mais au fait quy a-t-il de si important là-bas ?
C'est là-bas que se réunisses les rêveurs... Il fallait un lieu de réunion, afin de nous organiser...
Le rêve dispose lui aussi de ses dangers et unis, nous sommes plus fort... Vous arrivez rapidement jusqu'à l'entrée du portail... Le lieu désignée sur la carte semble être un arbre ou vivent une b=nichée de rosignol.. Les oiseaux vous accueillent avec un chant mélodieux. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Un lieu de réunion
unis
contre qui ?
Que lui cachait Yann ? Jusquà présent, il lavait docilement suivi sans contester le moindre de ses dires Il sourit. En avait-il seulement eu la possibilité ou même lenvie ? Il promena son regard sur larbre qui semblait vieux mais vigoureux. Chacune de ses branches lui apparaissait comme autant de bras protecteurs supportant le fragile couple de passereaux qui les accueillait de leur chant aux harmonieuses sonorités. Malgré le profond sentiment de paix qui se dégageait de cet endroit, Lucian restait perplexe. La zone était discrète et latmosphère apaisante, peut-être trop Le portail était formidablement bien dissimulé, comment les rêveurs faisaient-ils pour le traverser ? - Nous y sommes mais je ne vois rien qui ressemble de près ou de loin à un portail Le jeune homme effleura de la main la surface rugueuse du tronc, cherchant à en percevoir la moindre aspérité.
Yann s'attarde à reprendre le sifflotement des oiseaux. Le voyageur semble ailleurs un instant.
Lucian quand à lui a la surprise de ne pas rencontrer le tronc de l'arbre. Il est impalpable, sans consistance, comme s'il pouvait passer au travers. Il doit s'agir du portail... Alors que Yann porte à nouveau le regard sur Lucian, il fronce les sourcils. Tient, tu es musicien ? Le garde désigne du doigt un petit instrument de musique qui dépasse de la poche de Lucian. Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
Lucian délaissa un instant son inspection, sa main caressa le petit tube de bois sculpté qui dépassait de sa tunique. Il en sortit le petit instrument et le fit tourner entre ses doigts pour en apprécier toute la beauté et le patiné verni incrusté de nacre.
- Cette flûte me vient de ma mère, je la surnommais la musicienne de laube. Il esquissa un sourire. - Sa longue chevelure brillante tressée de fleurs roses, oranges et bleues encadrait son visage fin et mettait en valeur ses yeux sombres et profonds si difficiles à sonder. Je la revois, assise chaque matin sur la margelle du petit balcon qui surplombait le grand jardin. Sa musique faisait danser devant mes yeux les histoires que nous contait ma sur dun chant empreint d'une atmosphère chaude et veloutée. Lucian porta la flûte à ses lèvres et fit vibrer dun léger souffle la petite colonne dair doù séchappa une douce mélopée. Il sarrêta net et continua dune voix où pointait lémotion. - Ma mère la surnommait 'Rose éternelle', car son toucher était aussi doux que les pétales de cette fleur qui reflétait à merveille sa passion pour la musique et ce quelle lui inspirait, grâce et volupté. Le jeune homme tendit linstrument vers Yann pour quil puisse ladmirer de plus près. - Elle y a dailleurs fait graver deux roses entrelacées, symboles de son amour pour la poésie des notes et de son amour terrestre Le cadet ferma les yeux et se remémora le visage de sa mère, rayonnant joyau se découpant sur lécrin de lhorizon. Il se remit à jouer, humble hommage à cette femme qui lui avait donné à travers ses mélodies, ce goût pour laventure, pour la vie.
Yann arrête le geste de Lucian.
Non garde là et joue m'en un morceau veux-tu ? Je doute que sa présence soit anodine... Puisse Gaïa veiller sur vos pas.
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