[TRAINING] - DJIRUNYAZA

[Astro Buck]

TRAINING
DEFIS FANTASTIQUES



par ASTRO BUCK


Avec l'aimable participation de DJIRUNYAZA

Djirunyaza arrive au pied des imposantes fortifications de la Cité de Fang. Le mur d’enceinte, badigeonné à la chaux, est d’une blancheur éclatante sous le soleil printanier du Mois des Semailles. La foule qui se presse massivement pour passer la Grande Porte est aussi innombrable qu’une fourmilière en activité, mais elle n’en a pas l’uniformité. En effet, la population, venue des quatre coins du monde, de tous les horizons, de toutes les cultures, de toutes les couches sociales, présente un aspect des plus hétéroclites. Dans une foule aussi bigarrée, il serait plus difficile de se faire remarquer pour son excentricité que de passer inaperçu.

La Grande Porte, à double ventail, est taillée dans un bois épais, doublé de métal, d’une trentaine de centimètres d’épaisseur. Il n’a pas encore été conçu, le madrier capable de les enfoncer ! De part et d’autre de la porte, la garde armée du baron fait une démonstration de force. Djirunyaza peut compter plus d’une vingtaine de fantassins les uns équipés d’un bouclier et ceints d’une grande épée, les autres tenant une hallebarde et portant une épée au côté. Ils portent tous un arc dans le dos, sont coiffés d’un casque et vêtus d’un tabard blanc immaculé, orné d'un écusson aux armes de la ville, recouvrant une chemise en cotte de mailles. A ces fantassins s’ajoute une dizaine d’archers elfes, vêtus d’une armure étincelante comme de l’or poli. L’ensemble est imposant et dissuasif. Le message est clair : les festivités de la Cité de Fang seront policées et ne donneront pas licence à tous les désordres ! Quiconque ne respectera pas les lois prescrites par le baron sera rapidement appréhendé et châtié.




Djirunyaza doit prendre son mal en patience car la foule abondante qui cherche à passer la porte est ralentie par les interrogatoires et les inspections des gardes. Alors que l’adorateur de Courga n’est plus qu’à deux mètres de la porte et pense être enfin sur le point de la franchir, l’individu qui le précède, encapuchonné dans un habit taillée dans une grossière toile de jute et tirant une charrette à bras, se voit subir un interminable interrogatoire. En dépit de son misérable accoutrement, il s’affranchit de la taxe de passage, laissant tomber une poignée de petites pièces noircies de crasse dans la caisse prévue à cet effet. Ensuite, les gardes lui demandent d’ôter la bâche qui recouvre sa charrette, afin de vérifier ses déclarations. Alors que l’individu se retourne, Djiunyaza comprend la raison de la méfiance des gardes : c’est un DEMI-ORQUE. Ces créatures sont constamment discriminées, partout où elles vont, et suscitent une méfiance de principe, en raison de préjugés profondément ancrés dans les consciences. Quand il soulève la bâche, le contenu de sa charrette se dévoile : c’est un empilement de chiffons sales, des morceaux de métal tordu, des chutes de coupons de cuir, des peaux d’animaux miteuses, des os et même des arrêtes de poisson… Les gardes, ne voulant pas y plonger les mains, se munissent de gaffes de pêcheur et soulèvent d’un air écœuré les différents éléments de ce chargement. Finalement, n’y trouvant rien d’illicite, c’est presque à regret, qu’ils laissent passer le demi-orque. C’est enfin au tour de Djiunyaza.

L’Officier de la Porte le regarde de la tête au pieds avant de lui demander :

[OFFICIER DE LA PORTE] – Etranger, que transportes-tu et quelles sont les raisons de ton séjour dans la noble Cité de Fang ? Sache que pour passer ces portes tu devras aussi être en mesure de t’affranchir de l’octroi, dont le montant sera calculé en fonction de tes réponses. Allons, parle !

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Salut DJIRUNYAZA

Pour commencer, je te demanderais de lire ces 10 points de règles (lien à cliquer ci-dessous) qui devront être mis en application dans la création des textes.

http://forum.ventsombre.net/viewtopic.php?f=54&t=14153


En deuxième lieu, nous allons aborder les Regles d'écriture. Celles -ci, et les 10 Regles plus haut, sont applicables quelque soit le forum ou l'on joues sur Ventsombre


- Essaie d'écrire tous les jours, ou avec maximum 3 jours de décalage pour ne pas ralentir le groupe. Au delà, prévient dans le post absence

- Tu écris tes textes à la 3ème personne en essayant d'avoir au moins une 20 aine de lignes pour chaque post.

- Afin d'étoffer ton texte, tu peux y inclure les états émotionnels, les ressentis, les introspections de ton personnage, en plus de ses actions physiques visibles de tous ou de ses paroles. Il n'y aura qu'en période de combat ou les joueurs sont autorisés à faire des posts plus courts détaillant leur mouvement ou technique d'attaque. Nous en reparlerons.

- Tu verras que, lorsque tu seras en groupe, le MJ peut t'envoyer des informations privées par PM. Il faudra éviter de les divulguer dans la partie publique, sauf si ton personnage PARLE en mode parole UNIQUEMENT. Tu sera toutefois libre de cacher ces info aux autres personnage ou de les leur donner (en les recopiant) dd

Pour ton premier post, commence par décrire physiquement ton personnage de façon précise, ce qu'on voit en la regardant et tu rajoutera toujours la photo du perso en grande taille (avec le buste) afin d' appuyer ton texte (et non pas le remplacer ). ¨Voici un petit exemple en bas du post du MJ


NB : Par la suite, durant l'aventure, il te sera souvent demandé de présenter ton perso à de nouveau joueur. Dans ce cas, il faudra utiliser ce même post et il te suffira de cliquer sur CITER pour ensuite faire un "copier coller" du texte. Ainsi tu retrouvera toutes les balises et l'image du perso


DENIER POINTS, dans tes écris, vérifie bien ton orthographe et ton texte avant d'envoyer, et utilise les balises comme expliqué ci dessous ( et aucune autre) :

1. les paroles du personnage seront écrites en mode NORMAL, précédées par un "[NOM DU PERSONNAGE] - " (en majuscule + tiret )
   
   [NOM DU PERSO] - blablabla
   
   
   S'il crie ou chuchote, tu peux jouer avec la taille de police => balise [ size=75] [/size]
   
   [NOM DU PERSO] - je chuchotte
   
   
   [NOM DU PERSO] - Je crie ou JE CRIE!
   
   
2. Toute description sera faite en italique. Balise [i ][/i]
   
   Par description on sous-entend tout ce qui concerne les actions physiques du perso, ses attitudes de mouvement et éventuellement des détails liés au décors qui l'entoure et qui pourraient faire vivre l'ambiance...Attention toutefois à ne pas faire avancer le scénario et ne pas avantager le personnage (Donc on peu décrire un oiseau qui passe, un chat qui miaule, mais pas un inconnu qui te donne une arme, un billet qui traine sur la table etc..)
   
   
   Tu peux également mettre des réflexions personnelles non perceptibles par les autres participants à la scène. Mais attention à ne pas influencer le RP des autres joueurs en divulguant des infos secrètes( ex. Il savait que le coffre était piégé et préférait attendre que quelqu'un d'autre l'ouvre => Aucun joueur n'aura envie d'ouvrir le coffre )
   
   
3. Une pensée sera placée entre " * " (astérisque)
   
   *CA ME GONFLE CES REEEEGLES*
   
   Ici aussi, on peut marquer les pensées intimes du perso mais attention à ne pas influencer le RP des autres joueurs en divulguant des infos personnelles( ex. *Putain, dés qu'il a le dos tourné, je le bute!!!* => Le dit joueur ne te tournera curieusement jamais le dos )
   
   
4. Une expression ( un ton ou un geste particulier) pourra être placé entre " " (guillemets)
   
   
5. Les discussion HRP se font dans le salon de la taverne ainsi que les jet de dés (ou par PM)
   
   

Nous reviendront sur ces petites regles au fur et à mesure de ce training ou nous verrons les balises, et la gestion des combats bien sur.


Voilà, tu sais tout, c'est à toi! (

Clique sur le bouton Répondre et construit ton texte (fais le d'abord en Word pour éviter les accidents qui viendraient à effacer ton texte. C'est arrivé à plusieurs reprises!)

[Djirunyaza]

Conscient du travail harassant du garde qui lui fait face, Djirunyaza efface de son visage toute trace de tension due à la longue attente qu’a constitué les dernières centaines de pas qui le séparait des lumineuses murailles de la cité du Baron Sukumvit. Plongeant ses yeux dans ceux de son interlocuteur, il lui adresse un salut de tête respectueux en dépit de l’écart existant entre leur position sociale, et écarte les bras de façon rituelle. Ce geste, invitant à une embrassade symbolique, a la double faculté d’indiquer à l’homme d’arme qu’aucun objet tranchant ou contondant caché ne franchira la porte avec lui et de dévoiler le symbole du Chat pendant au bout d’une courte chaîne au cou de Djirunyaza, symbole tutélaire de sa douce Déesse.

[DJIRUNYAZA] - Je te salue bras armé du noble Baron Sukumvit! Je me nomme Djirunyaza, serviteur de Courga, Déesse de la Grâce, fille d’Usrel la pacifique, soeur de Fourga l'orgueilleux et mère de Telak, le lion porteur du glaive de lumière, protecteur des hommes d’armes. Je viens comme tout un chacun participer aux festivités à venir et j’avoue avec une certaine gêne que je porte tant de chose qu’il m’est devoir de donner aux gens de cette ville que je crains n’avoir le juste octroi dû à votre formidable Seigneur, même avec tout l’or des mines de Crocheroc!
Je porte la joie et la félicité que chaque seconde le Jardin Céleste m'insuffle, je porte la charité que l’on doit à ceux qui ne peuvent communier directement avec les Dieux et je porte l’harmonie du corps et de l’esprit.

Djirunyaza trace alors avec son pied une ligne droite entre lui le garde et initie un léger pas de danse tout en souplesse et en grâce, le tout veillant à ce qu’aucune partie de son corps ne dépasse la ligne tracée. Ici aussi, la symbolique double est présente, je t’offre les bienfaits de Courga par ma danse mais en aucun cas tu n’as le droit de me fouiller sans craindre son courroux.
Puis il reprend sa posture d’origine, attendant la sentence du portier, un sourire bienveillant aux lèvres.

[Astro Buck]

Alignés à quelques pas de là, les archers elfes, sensibles à l'art, applaudissent - avec retenue et dignité toutefois - la performance de Djirunyaza. Le portier les regarde en fronçant les sourcils d''un air agacé. Il ne s'est, quant à lui, à aucun moment départi de son air blasé durant la danse. L'homme en a déjà tellement vu et entendu qu'il lui en faudrait beaucoup plus pour l'étonner ou susciter son admiration.

Dans la file serrée qui se presse derrière Djirunyaza, une équipe de Nains terrassiers s'impatiente et fait exprès de faire des réflexions à voix haute pour que tout le monde les entende :

[NAIN NUMÉRO 1] - C'EST PAS BIENTÔT FINI OUI ?

[NAIN NUMÉRO 2] - TOUJOURS LES MÊMES QUI S'AMUSENT PENDANT QUE LES AUTRES TRAVAILLENT !

[NAIN NUMÉRO 3] - ON A UN IMPORTANT CHANTIER QUI NOUS ATTEND, NOUS. ON N'A PAS LE TEMPS DE RACONTER DES HISTOIRES DE NOURRICES SUR DES DIEUX OUBLIÉS

[OFFICIER DE LA PORTE] - Bon, il est inutile de me faire votre numéro. J'ai compris, vous êtes un saltimbanque. Par contre je ne me contenterai pas d'un pas de danse et d'un sourire en guise d'octroi. Pour les saltimbanques, la taxe est d'un demi Charavask ou cinq Etoiles. Ou si vous préférez : l'équivalent d'une Pièce d'Or ou cinq Pièces d'Argent dans une autre monnaie.

Il désigne un garde qui tient une cassette ouverte. C'est là que le chiffonnier demi-orque avait jeté ses pièces.

[hrp]En consultant ta feuille d'aventure, je constate que tu n'as pas calculé la somme d'argent dont tu disposes. Or tu as droit à 2D6 Pièces d'Or. Tant mieux, cela nous donne l'occasion de passer immédiatement à une étape essentielle du training : le lancé de dés.

Chaque fois que tu annonces une action dont l'issue est incertaine (évidemment, s'il s'agit d'attraper un sucre dans la sucrière pour le mettre dans ton café, cela ne nécessite pas de lancer de Dé ) il te faut prendre le réflexe de procéder automatiquement à un lancé de Dé afin de déterminer si l'action est réussie ou non.

Pour le mode d'emploi du lancer de Dé, suivez le guide, c'est par ici :
[/hrp]

http://forum.ventsombre.net/viewtopic.php?f=295&t=14119[/hrp]

[Djirunyaza]

Djirunyaza conserve son chaleureux sourire, habitué à cette courante méprise.

*Nous prêtres de Courga sommes presque les seuls serviteurs divins à ne pas avoir de tenue ostentatoire symbolisant notre charge. Pas de robe rouge comme pour Asrel ou Fourga ou Orange pour ceux de Filash, verte pour Galana… non, Courga ne se démarque que par son élégance.*

Il se détourne cependant un instant de l’homme d’arme pour gratifier les Archers Elfes d’un mouvement de poignet souple et circulaire témoignage de son humble reconnaissance pour leur geste amical. Puis il revient immédiatement au garde en faction le dardant d’un regard intense et modifiant sa voix pour la rendre plus adéquate à son statut de prêtre avec une solennité teintée d’une touche de reproche.
En même temps qu’il parle, il se saisit et plonge sa main dans sa maigre bourse.

[DJIRUNYAZA] - Un saltimbanque porte histoires et noms héroïques bien plus loin et plus haut que la durée et la valeur de nombre de vies humaines, je vous remercie donc pour votre erreur manifeste. Cependant, ne pas reconnaître un serviteur des Dieux lorsqu’il s’en présente un à votre seuil témoigne d’une fatigue bien compréhensible en ces jours de liesse populaire, mais qui serait préjudiciable à votre Haut Seigneur le Baron Sukumvit s’il l’apprenait d’une quelconque chapelle.

Dans même geste, il efface d’un pied la ligne qu’il avait tracée quelques instant auparavant, tend la main et fait tomber dans le trésor public les 3 pièces d’or qu’il avait négligé de donner aux plus nécessiteux, que Courga le pardonne. Enfin, son mouvement se termine une main posée sur l’avant bras armé du portier et lui apporte la grâce de Courga avec le prodige GUÉRISON.

[DJIRUNYAZA] - Que Courga te guérisse de toute la fatigue accumulée dans l’exercice de ton devoir.

[hrp]le garde regagne 6 points de vie, autrement dit il pète la forme.[/hrp]

Puis il lui glisse à l’oreille, de nouveau avec un grand sourire.

[DJIRUNYAZA] - cela dit mon ami, je t’invite à fouiller avec zèle les trois gaillards qui me suivent. Parler de Dieux oubliés alors que, notamment, Telak le dieu guerrier est chaque jour vénéré dans votre merveilleuse cité de Fang est, soit une marque de grande bêtise, soit un signe d'allégeance démoniaque...

Puis il poursuit un léger mouvement vers l'entrée de la ville, espérant que le garde s'effacera.

[Astro Buck]

[hrp]Tu as parfaitement intégré les règles d'écriture, c'est top !

J'attire toutefois ton attention sur un point. Quand tu utilises une faculté de ton personnage pour agir sur ton environnement, il faut écrire au conditionnel et laisser le soin au MJ de déterminer si l'effet attendu sera ou non opérant. Par exemple, ici tu utilises ton Prodige sur le garde et ta connaissance des règles te permet de t'auto-meujeuter pour en décrire les effets, ce qui te fait écrire entre les balises HRP : "le garde regagne 6 points de vie, autrement dit il pète la forme". Cependant il aurait pu se faire que le Prodige n'opère pas, que tu tombes sur un PNJ résistant à la magie ou que soudain, étant disgracié par ton dieu pour une quelconque raison, celui-ci demeure sourd à tes appels... Ce n'est pas le cas, donc pour cette fois il n'y a aucune modification à apporter à ton texte, mais je t'invite à être attentif à cet aspect. D'ailleurs, c'est un point que tu respectes parfaitement à la fin de ton Post, en écrivant "espérant que le garde s'effacera".

Enfin, concernant ce que Djirunyaza murmure au garde "Telak le dieu guerrier est chaque jour vénéré dans votre merveilleuse cité de Fang" : soit ce propos formule une information que Djirunyaza connaît, auquel cas il aurait fallu d'abord s'assurer du fait qu'il détient cette information en faisant un Test de Connaissance du Monde, ou de Connaissance de la Ville ou de Connaissance des Religions, selon ce qui aurait été le plus approprié à la situation et à ta feuille d'aventure ; soit le propos de Djirunyaza est un coup de bluff animé par l'intention de susciter la méfiance du garde à l'égard des Nains, auquel cas on aurait fait un test de Duperie.

Bon, là nous sommes vraiment dans les petits points de détails, parce qu'à tout autre point de vue, il n'y a absolument rien à redire et c'est même un vrai plaisir de te lire !

Allez, zou ! on passe à la suite...[/hrp]

L'officier de la porte demeure impassible aux insinuations perfides que Djirunyaza profère à l'endroit des Nains. Par contre, il n'est pas insensible à l'opération théurgique du Prêtre de Courga. Le voici tout à coup qui redresse son buste, déploie ses épaules et ouvre un œil vif sur les arrivants. D'un claquement de doigts énergique, il ordonne aux hallebardiers de laisser entrer le nomade, puis, alors qu'il s'était jusqu'ici exprimé de manière laconique, sur un ton monocorde et morne, il s'écrie tout à coup d'une voix dynamique et presque chantante :

[OFFICIER] - Au suivant ! Allez ! Hop ! Hop ! Hop ! C'est mou, ça ! On se presse, en cadence ! Je veux tout savoir sur vous ! Dites moi tout, tout, tout ! Je veux savoir votre nom ! Je veux connaître le motif de votre séjour ! Et n'oubliez pas de m'indiquer toute marchandise à déclarer ! Alors ? Je vous écoute ! (S'adressant aux gardes :) Et vous-là au lieu de rester plantés comme des piquets, allez, fouillez-moi tout ça, flairez, fouinez, inspectez !

Djirunyaza passe enfin la Grande Porte et s’engage dans une large rue pavée. Une foule abondante, bruyante et agitée, s’y écoule dans le plus grand désordre. La hauteur des murs encadrant la rue est impressionnante pour qui n’est pas habitué à l’environnement urbain : la plupart des bâtiments, en effet, sont hauts de deux ou trois étages. Sous leur ombre, l’air est froid et chargé d’humidité. Les enseignes signalent une multitude d’échoppes, d’ateliers d’artisans, de tavernes et d’auberges. Par contre, Djirunyaza ne voit pour l’instant aucune architecture qui pourrait s’apparenter à un édifice religieux.

Nous ne sommes qu’à trois semaines environ de l’Epreuve des Champions, mais on sent déjà dans l’air un parfum d’excitation, une énergie frénétique engagée dans les préparatifs : ici un boutiquier repeint sa façade, là un aubergiste accroche une enseigne flambant neuve, plus loin un drapier déroule une banderole depuis sa fenêtre… Par la fenêtre des auberges, dans un tintamarre de casseroles, s’échappe un fumet de bouillon gras et de viande mijotée qui met l’eau à la bouche des passants. La grande rue se dirige tout droit vers l’ouest et de petites ruelles la traversent ça et là. Il sera malaisé de s’orienter dans cette grande ville.

D’ailleurs, les locaux savent l’effet déconcertant que cela peut faire aux nouveaux arrivés et en profitent pour vendre leurs services comme guides. L’un deux, un homme au visage assombri par un grand chapeau et revêtu d’un long manteau élimé, fait un signe à Djirunyaza.

[L’HOMME] – Salut à toi étranger ! Je m'appelle Mortizak, pour te servir. Sois le bienvenu dans ma noble cité. Tu as le regard franc et le pas sûr d’un honnête homme, mais tu sembles aussi perdu qu’un oisillon tombé du nid. C'est bien normal : Fang est la plus grande ville du monde ! Dis-moi où tu souhaites aller et en échange de quelques menues piécettes, je t’y mènerai sans faillir par le plus court chemin !

[Djirunyaza]

Ayant gardé aux lèvres le signe de son indéfectible bonne humeur, Djirunyaza jauge un instant son interlocuteur et ses intentions.

*Après notre ami portier qui me croit saltimbanque, en voici un qui me sais sans repère et qui me croit sans défense!... Courga, toi qui brille par ta joliesse, pardonne moi pour cette pensée mais quelle idée passe par la tête des parents qui intègrent au nom d’un homme celui de l’ennemi des Dieux bons du Jardin Céleste! Bon, on va vite voir ce qu’il a derrière la tête notre sauveur de coins de rue au nom mortifère*

[DJIRUNYAZA] - Mon ami, c’est la divine providence qui te met opportunément sur ma route! Je dois bien avouer que depuis mon désert natal, là-bas loin au Sud dans le Désert des Crânes, terres des cruels Hommes-Serpents et des Vers des Sables géants aussi hauts qu’une de ces maisons...

Il pointe son bâton sculpté et lesté vers le faîtage de la maison la plus proche d'un geste théâtrale et le rebaisse avec une vitesse et une force propre à briser un crâne de malotru

[DJIRUNYAZA] - Fang est vraiment la plus grande ville que je croise… enfin, peut-être la deuxième plus grande après Salamonis! Fufufu…
Tu es donc dans le vrai, je ne sais pas où aller...mais après un si long voyage j’irai bien remercier les Dieux pour avoir veillé sur moi. Quels sont les temples présents en ville?

En prononçant cette dernière phrase et attendant la réponse, il embrasse du regard les rues visibles alentours et scrute rapidement la foule présente, non sans chercher à voir s’il y distingue la toge coloré du prêtre d’un Dieu bon passant par là et sans doute plus prompt, même si l'hiver est encore loin, à lui donner la foi pour guider ses pas.

[Astro Buck]

Mortizak passe une main sous son chapeau et fait une moue admirative.

[MORTIZAK] – Je ne connais pas tous ces lieux exotiques, je n’ai pas la chance d’avoir voyagé aussi loin.

Il exécute plusieurs tours sur lui-même en écartant les bras.

[MORTIZAK] – Par contre je connais ma ville comme ma poche, jusqu’en ses plus infimes recoins ! Vous cherchez la taverne où l’on boit la meilleure bière ? L’hôtellerie où la literie est la plus fraîche et la plus délicate ? L’auberge la moins chère ? Le puits qui donne l’eau la plus pure ? La rue la plus sombre où vous adonner à vos vices les plus secrets ? (Il lance un gros clin d'œil goguenard à Djirunyaza.) Allons, je suis sûr que vous en avez, non ? Mais si. Tout le monde en a ! A moins que vous ne cherchiez le lieu où il faut s’inscrire pour vous offrir une mort glorieuse à l’Epreuve des Champions ? Quoi que vous cherchiez, nul ne vous guidera mieux que moi !

Après avoir déclamé son discours bien rôdé, Mortizak s’absorbe quelques secondes dans ses réflexions. Puis il sursaute comme s’il venait de se réveiller :

[MORTIZAK] – Ah mais je m’égare ! Moi, le guide… je m’égare ! Vous comprenez ? Ha ! Ha ! C’est drôle, hein ?

Conscient, semble-t-il, de s’être un peu trop appesanti sur sa piètre blague, il reprend aussitôt un air sérieux.

[MORTIZAK] – Bon, bon, vous cherchez les temples, c’est ça ? C’est bien ça. Les temples les plus fréquentés ici sont ceux dédiés au puissant Titan, à la juste Libra et à la bienheureuse Sindla. Mais il y a beaucoup de temples en ville. Peut-être même qu’il y en a autant que de dieux dans tout l’univers. N’oubliez pas : Fang est la plus grande cité du monde, n’en déplaise à votre Salamonis ! A moins que les trois temples que j’ai cités vous satisfassent, cela irait plus vite si vous me disiez lequel vous cherchez précisément. Enfin, si vous désirez vous rendre dans l’un d’eux, sachez que vous n’êtes pas du tout dans le bon quartier : ici vous ne trouverez que des commerces, des auberges et des ateliers d’artisans. Aussi je me permets de renouveler ma proposition : en échange de quelques piécettes je vous conduis où vous voulez.

Il joint ses mains comme s’il allait se mettre à prier.

[MORTIZAK] – Je vous ai déjà offert gracieusement des informations utiles et fiables. Au risque de vous paraître vil et cupide, je ne peux rien vous donner de plus sans contrepartie, comprenez-moi, il faut bien que je trouve de quoi remplir mon écuelle.

Pendant que Mortizak lui déclamait son laïus, Djirunyaza a largement eu le temps de scruter la foule environnante. Mais il n’a vu personne en qui il aurait reconnu le fidèle d’un culte quelconque.

[Djirunyaza]

Les dents bien exposées tel un bouclier d’ivoire, Djirunyaza se reconcentre sur son interlocuteur virevoltant qui vient de clôturer sa doléance.

*Tiens, son geste en rotation ne manquait guère de grâce, voilà une bonne surprise! Mais est-il si laid qu’il lui faille ainsi cacher son visage?*

Puis son air se fait plus songeur, les yeux dans le vague.

[DJIRUNYAZA] - Croire que l’on n’a aucun vices cachés touche à l’Orgueil propre à Fourga. Mais les trouver demande sans conteste un art, une expertise que je n’ai pas. Sur ce plan, Courga est ma guide, elle m'insuffle l’humilité nécessaire à servir mon prochain et à lui faire découvrir l’harmonie dans le chaos du monde. Un jour me faudra-t-il peut-être visiter l’une de vos ruelles sombres…

Sortant de ses pensées, il revient une nouvelle fois à Mortizak, l'œil désormais pétillant et très intéressé par ce que cache ce chapeau omniprésent...

[DJIRUNYAZA] - Votre humour vous va bien vous savez, peut-être que dans un autre temps, une autre langue ou un autre lieu, votre trait d’esprit de guide aurait fait fureur!

Un petit silence s’installe au milieu du chahut ambiant de la ville effervescente.

[DJIRUNYAZA] - Cela dit, nous avons un point à régler pour aller plus avant dans notre échange. Car voyez vous, suite au paiement du juste octroi nécessaire au passage de la porte de la ville, je me vois être sans le moindre sou vaillant, et ma bourse est plate comme un désert sans dunes… verticalement parlant cela dit. C’est pourquoi, si vous acceptez d'être mon guide terrestre, je ne peux que vous garantir un repas chaud si vous m’amenez dans un temple de Throff, de Solinthar ou éventuellement de Galana… votre écuelle sera pleine grâce à votre générosité! Qu’en dites-vous?

Il scrute la réaction de Mortizak et essaye d'apercevoir ce qui entoure cette moue chapeauté.

[Astro Buck]

En lorgnant sous le chapeau de Mortizak, Djirunyaza devine difficilement les traits de son visage que dissimule une barbe fournie et des moustaches tombantes. Mais cet examen permet à l’homme du désert de percevoir deux détails auxquels il n'avait pas prêté attention jusque-là. Premier détail : Mortizak porte, glissé dans sa ceinture, une dague dont le manche se termine par un pommeau en ivoire sculpté en tête d'éléphant.

Second détail : un chat se tient à un mètre en arrière de Mortizak et le suit à chacun de ses pas.

Mortizak sourit en entendant les paroles de Djirunyaza.

[MORTIZAK] – Je vous donne raison ! Prétendre n’avoir aucun vice, est en soi la manifestation d’un vice : l’orgueil, que seul les adorateurs de Fourga tiennent pour une vertu. Il est heureux que son humble sœur, Courga, soit votre guide spirituelle. J’ai connu jadis une jeune danseuse équilibriste au talent inégalable et son partenaire voltigeur, qui vénéraient tous deux votre déesse.

Ses yeux devenus rêveurs à l'évocation de ce souvenir, se voilent quelques instants. Puis, l’homme porte soudain ses deux mains à son ventre en grimaçant.

[MORTIZAK] – Oups ! Mes entrailles gargouillent. Elles s’affolent depuis que vous avez parlé de repas chaud. J’accepte votre proposition : un bon repas sera le meilleur des paiements.

Il lève les yeux et regarde les façades alentours.

[MORTIZAK] – Bien ! De là où nous sommes, l’itinéraire le plus court pour gagner le Quartier des Temples serait d’aller tout droit en direction du lac central, puis de longer les quais. Vous me parlez de Solinthar… son lieu de culte est certainement le premier temple que nous verrons car son fronton donne sur le port. Rien d’étonnant, me direz vous !

Il se met à se caresser la barbe d’un air contemplatif.

[MORTIZAK] – Par contre, ce qui m’étonne, ce que vous vous dites guidé par Courga… et cependant, ce sont les temples d’autres dieux que vous souhaitez visiter ? Enfin… Pardonnez ma curiosité. Ce ne sont pas mes affaires ! Allons, en route !

L’homme se met à marcher à grandes foulées dans la grande avenue bordée de boutiques.

[Djirunyaza]

Djirunyaza emboîte le pas de son guide affamé, mais cherche si c’est possible à lui faire ralentir le rythme.

*Découvrir la ville, s'imprégner de cette foule bigarrée et laborieuse fait aussi partie du but de mon errance…Regarder leurs maisons ternes, leurs échoppes débordantes, mais surtout trouver, dans la foule massive, aveugle et sourde, des gouttes de légèreté! Mon devoir est d’apporter la chaleur d’un sourire à quiconque serait disponible à le recevoir… quel bonheur de voir la grâce de Courga apparaître au travers d’un visage heureux de se voir offrir un don si simple et le rendre sans autre forme de procès, presque par réflexe, arrêtant un instant un geste répété mille fois, ou une course au bénéfice d’un autre..*

L’homme de foi cherche donc dans la conversation un moyen de freiner Mortizak.

[DJIRUNYAZA] - Voilà une chose extraordinaire que de voir ainsi un chat vous suivre de la sorte. Quel est son nom? Je ne voudrais pas lui paraître familier, mais le chat, par sa grâce naturelle, est l’une des incarnations de Courga! Regardez moi ce déplacement, cette fluidité, ce sens naturel de la beauté simple!
Et il y a un lac au centre de la Ville? Voilà qui est surprenant! Je n'ai v...raiment jamais vu ça! Sauriez vous m’en dire plus sur l’histoire de “la plus grande ville du monde”?
Et l’épreuve des champions, y a-t-il déjà de courageux volontaires pour y faire face? Depuis Calice, tout le monde parle du labyrinthe du Baron Sukumvit, et encore plus nombreux sont ceux qui disent venir y assister! Si la foule augmente encore, il nous faudra bientôt des griffons pour pouvoir passer de quartier en quartier!

En parallèle, il cherche dans un coin de sa tête (mais ce n’est pas sa priorité!) au travers de ses connaissances en artisanat et en religion ce à quoi peut bien renvoyer cette tête d’éléphant qui appartient par ailleurs à la faune du désert. Et s’il lui reste un coin de tête disponible, il continue de chercher à repérer un religieux vénérant les Dieux bons.

[Astro Buck]

Alors qu'il avait pris de la distance, Mortizak se retourne, constatant avec surprise que Djirunyaza est à la traîne. Il l'attend et s'applique cette fois à épouser le rythme de sa marche.

[MORTIZAK] - J'ai toujours marché à grandes enjambées... comme si j'avais mille choses à faire.

Il s'accroupit et tend la paume de sa main, contre laquelle le chat vient frotter sa tête en arrondissant le dos.

[MORTIZAK] - Lilicia est très grâcieuse, c'est vrai. Je lui ai donné le prénom de la danseuse dont je vous ai parlé. Quand on est seul comme moi, on fait comme on peut pour peupler sa solitude, fût-ce avec les fantômes du passé...

Il se redresse et se remet à marcher.

[MORTIZAK] - Vous conter l'histoire de la ville, voilà qui excède mes compétences, étranger... D'ailleurs, vous ne m'avez pas dit quel est votre nom. Si l'Histoire vous intéresse, il faudrait plutôt vous adresser à un érudit, comme Ellagrim Grimalkin par exemple.

Tout en continuant à marcher, l'homme tend le bras et pointe son index en avant.

[MORTIZAK] - Vous voyez cette forêt de mâts, là-bas, ce sont les bateaux qui mouillent dans le lac central. Fang est en effet bâtie autour d'un lac irrigué par la Rivière Kok, un large cours d'eau que vous avez forcément dû traverser à un moment donné. Cette rivière descend depuis les glaciers et se jette dans l'Océan de l'Ouest.

En effet, en continuant à descendre l'avenue, Djirunyaza commence à distinguer tout au bout de nombreux mâts de bateaux et des pavillons colorés qui ondulent dans le vent.

[MORTIZAK] - L'Epreuve des Champions attire toujours son lot de fous, venus des quatre coins du monde pour y trouver la mort. J'y ai moi-même perdu mon meilleur ami. A ma connaissance, les inscriptions sont déjà ouvertes. J'espère que ce n'est pas la raison de votre venue ?

Les réflexions et les observations de Djirunyaza n'ont pas porté leur fruit. La tête d'éléphant sculptée ne lui rappelle aucune signature artisanale particulière. Il ne connaît pas non plus de culte religieux qui serait spécifiquement associé au symbole de l'éléphant. Quant aux religieux vénérant des dieux bons, il n'en voit pas l'ombre d'un seul. Mais c'est peut-être à cause de ce vent qui souffle de face et charrie des poussières qui taquinent les yeux. Pourtant, Djirunyaza a connu bien pire : les tempêtes de sable dans le désert, c'était autre chose !

[Djirunyaza]

*Voilà un discours… et un itinéraire vraiment rassurants quant aux intentions de Mortizak. Je ne serais d’ailleurs pas surpris d’apprendre que notre homme ait travaillé dans un cirque, ce qui pourrait peut-être expliquer la tête d’éléphant sur le manche de son couteau…*

[DJIRUNYAZA] - Je suis vraiment désolé pour votre ami… et je suis sûr que ses motivations étaient celle d’un homme bon.

Le prêtre émet alors un éclat de rire bienveillant, histoire de sortir son interlocuteur du vague à l’âme qui l’accable.

[DJIRUNYAZA] - Vous m’imaginez vraiment me lancer ainsi dans un défis aussi fantastique? Et pour y faire quoi d’abord? Vaincre les dangers et les obstacles préparés avec minutie par le maître des lieux et faire miens les 10000 pièces d’or dont on prétend qu’ils sont le prix? Le premier écueil est que j’ai fait vœu de pauvreté et que mon statut de prêtre me suffit pour vivre sans accorder à l’or l’importance qu’il a pour la plupart des gens. Et puis…

Se penchant tel un conspirateur vers son guide maintenant bien ancré à ses côtés, il lui chuchote à l’oreille:

[DJIRUNYAZA] - Il parait que tout se passe en sous-sol et que nul spectateur n’assiste aux hauts faits ou aux trépas des valeureux participants, comment dans ces conditions faire briller la grâce de Courga? Ou alors devrais-je me contenter d’apporter sa divine harmonie à un terrible gobelin embusqué! Voilà un écueil bien définitif! Fufufu…

Admirant la vue du lac urbain et des embarcations qui le peuplent, Djirunyaza se redresse et reprend une voix normale.

[DJIRUNYAZA] - Avant mon arrivée à Fang, un petit plaisantin m’a demandé de bien tendre l’oreille lors de la traversée du fleuve de la rive sud à la rive nord… histoire d’entendre le chant du Kok! J’espère qu’il savait nager…Fufufu… Je m'appelle Djirunyaza, je vénère Courga Déesse de la Grâce. Et j'aimerai sincèrement mon ami que vous me parliez de Lilicia afin que je danse ce soir à la gloire de sa grâce...

[Astro Buck]

Mortizac laisse échapper un éclat de rire à la blague de Djirunyaza sur « le chant du Kok ».

[MORTIZAC] – Ah ! ça fait du bien de rire ! Cela faisait longtemps que cela ne m’était pas arrivé. C’est un vrai cadeau ! Naguère, je savais faire rire moi aussi. Mais j’en ai moins souvent l’occasion aujourd’hui, les temps sont durs.

L’avenue s’ouvre sur les quais animés qui s’étendent circulairement autour d’un grand lac. Sous le vent, les mats s’entrechoquent, créant un étrange concert de percussions, ponctué par le cri des mouettes qui ont suivi les bateaux depuis l’océan et les cris des hommes qui s’affairent de toute part.

Ici des marins démêlent ou rapiècent des filets de pêche, là des dockers ployant sous de lourds chargements traversent les passerelles qui relient les pont des bateaux à la terre, plus loin on rabote un mât posé sur des tréteaux… Le lac de Fang n’est assurément pas un lac de plaisance : c’est un chantier permanent où nul ne reste inactif et où nul ne se déplace jamais les mains vides. Il y a tant de bateaux, de toutes tailles, fluviaux comme au long cours, que c’est à peine si l’on voit la surface de l’eau. Manœuvrer dans ce port doit requérir d’habiles talents de navigateur. Les bâtiments qui donnent sur le lac sont des entrepôts, des ateliers de charpente navale, les locaux de la capitainerie, une taverne dont l’enseigne à la peinture défraîchie représente un cheval à trois pattes.

Tandis que Djirunyaza découvre son nouvel environnement, Mortizac fait une halte pour répondre à ses questions.

[MORTIZAC] – Je suis bien aise d’apprendre que vous n’allez pas vous jeter dans la gueule de ce labyrinthe monstrueux qui dévore tous ceux qui en franchissent le seuil. Mon ami était-il un homme bon ? Quand il a disparu dans le labyrinthe, j’en ai fortement douté : un homme bon abandonne-t-il ses plus chers amis et sa famille pour aller se jeter dans un piège mortel ? Mais à sa décharge, il était hanté par les remords.

Craignant qu’elle ne se fasse écraser sous les bottes d’un marin ou les sabots d’un ouvrier, Mortizac prend la chatte dans ses bras.

[MORTIZAC] – Lilicia… Je ne sais ce qu’elle est devenue, hélas. Vous m’inspirez confiance, Djirunyaza, peut-être parce que, comme elle, vous êtes dévoué à Courga. Alors je vais vous en dire un peu plus… Si ma bourse n’était pas vide, je vous aurais bien payé une choppe à la Taverne du Poulain Boiteux. L’envie de boire me prend chaque fois que ces souvenirs me reviennent.

Il y a de cela quelques années, j’étais le directeur d’un cirque itinérant, où j’officiais également sous le nom de Cazitrom le clown. L’ami dont je vous ai parlé, Rungo le Colosse, faisait démonstration de sa force : il luttait à mains nues contre un Troll et, clou du spectacle, se laissait piétiner par Rabab mon éléphant. Lilicia faisait un numéro d’équilibriste sur le dos de Rabab, ainsi qu’un numéro de voltige avec son partenaire de scène. Elle était la légèreté incarnée, on aurait dit une fleur de lys tournoyant dans les airs, elle ne dansait pas, non : elle volait ! Son spectacle fascinait le public.

Et puis un malheureux soir…

Les mots de Mortizac s’étranglent dans sa gorge sous le coup de l’émotion. Il tousse dans son poing avant de reprendre :

[MORTIZAC] – Un malheureux soir, nous avons fait une représentation au Port du Sable Noir, dont vous devez connaître la sinistre réputation. J’ai eu la malheureuse idée – maudit soit mon nom ! – de me déguiser en Prince Azzur et de ridiculiser ce personnage. Ayant eu vent de ma prestation, il a envoyé ses séides nous attaquer dans la nuit, alors que nous dormions d’un sommeil bien mérité après un épuisant spectacle. Toute ma troupe a été capturée. A l'exception d'Elsevier, mon illusionniste, qui s'est volatilisé sous leurs yeux ébahis.

Un pirate muni d’un crochet a mutilé horriblement mon visage en fendant mes lèvres jusqu’aux oreilles avant de me laisser pour mort dans le caniveau.

Rungo a été jeté dans l’Arène de Sable Noir où il a affronté sans relâche des hommes, des animaux, des monstres… Et un jour, ultime cruauté, il s’est retrouvé face à… Rabab, mon cher éléphant ! Il était à mes yeux plus qu’un simple animal, c’était comme le prolongement de moi-même. Rabab avait été drogué et se trouvait animé d’une fureur destructrice incontrôlable, il s’est jeté sur Rungo qui n’a eu d’autre choix que de l’abattre pour sauver sa vie. Tout ce qui me reste de Rabab, c’est ce morceau d’ivoire qui orne ma dague.

Quant à Lilicia, je ne sais pas ce qu’ils ont fait d’elle. J’ai juré que je ferais tout pour la retrouver et pour me venger… Mais je ne suis ni un guerrier, ni un héros, je ne suis qu’un clown qui ne fait plus rire personne, je ne suis plus rien. Et ce n’est pas avec ma bourse vide que je pourrai engager des mercenaires. Voilà ma triste histoire. Allons, reprenons notre chemin, le Quartier des Temples n’est qu’à deux pas d’ici.

[Djirunyaza]

Tout en retenant si possible le rythme accéléré que Mortizak cherchera sans nul doute à imprimer à l’issue de ses péripatéticiennes confidences, l’enfant du Désert rouge se lance dans un discours où, à aucun moment, il ne regarde son guide.

[DJIRUNYAZA] - Mon ami, votre histoire n’est pas triste, c’est juste votre histoire. Ne vous méprenez pas sur mon propos, le sort de vos amis, humains ou animal, et de vous même est terrible. Cependant, votre abattement n’est en rien lié à ce qui s’est passé, mais au fait que vous êtes prisonnier d’un engagement que vous ne pouvez pas tenir… Cazitrom se nourrissait des rires et du bonheur que son art offrait aux autres, mais ce que vous avez juré de faire a fait de vous une image inversée, un pâle reflet, déformé par une haine désespérée qui ronge Mortizac… et vous condamne au néant de l’impuissance.
Avez-vous songé, ne serait-ce qu’un instant, que le formidable Rungo, avec sa force remarquable, se soit jeté dans le labyrinthe non par remords mais par espoir? Ne vous a-t-il rien dit de ses raisons? Qu’il ait envoyé le grand Rabab rejoindre le Jardin Céleste n’était sans doute pas sa motivation… peut-être avez-t-il en tête que, vainqueur de l’épreuve, avec le trésor du Baron, vous pourriez partir ensemble chercher Lilicia avec Mages et Hommes d’armes pour l’arracher au Prince cruel?

Le fervent de Courga marque une pause et gratouille d’une main la tête du chat blotti dans les bras de Mortizak. Puis, il reprend d’une voix douce et apaisée, les yeux fixés sur le félin.

[DJIRUNYAZA] - J’ai bien conscience que mon discours peut vous blesser mais laissez moi vous offrir un chemin spirituel tout aussi sûr que celui que vous m’offrez actuellement au travers de Fang! Sachez juste que nous sommes égaux… vous auriez pu vouloir me perdre dans la plus grande ville du monde et m’amener dans une ruelle sombre pour me molester plus que pour faire face à mes vices, mais je vous ai fait confiance… pas tout de suite bien sûr…fufufu… mais mes pas n’ont pas quitté les vôtres. Alors laissez encore un peu votre esprit être guidé par mes mots cruels tant ils portent vers l’espoir et non vers la renonciation: avez-vous pensez que votre ami illusionniste ait pu voir ce qui est arrivé à Lilicia et soit resté non loin d’elle afin de veiller la douce fleur de lys? Mais surtout, avez-vous pensé que vous étiez capable, sans tambour ni trompette, sans armée ni cortège, simplement de chercher Lilicia?

Après une nouvelle pause, Djirunyaza tourne son visage souriant vers l’homme balafré et d’un ton des plus détaché lui déclare:

[DJIRUNYAZA] - Il manque une pièce dans la charpente de votre histoire… qui était le voltigeur? Et qu’est-il devenu?.... Hum… c’est le chat qui ronronne ou c’est votre ventre qui gargouille?

[Astro Buck]

Mortizak reste interloqué à l’écoute du discours de l’homme du désert.

[MORTIZAK] – Rungo aurait concouru à l’Epreuve des Champions pour… Ma foi, je n’avais jamais vu les choses de cette manière ! Il était devenu taciturne après ce que nous avons subi à Sable Noir. Non, il ne m’a rien dit de ses raisons. Il ne s’en est pas même ouvert à son fils Mungo, d’après qui son père aurait pris cette décision « sur un coup de tête ». J’aime beaucoup votre interprétation des faits ! Je crois bien que je vais l’adopter. Merci de me faire profiter des fruits de votre bienfaisante sagesse.

Constatant que la chatte répond par un ronron aux gratouilles de Djirunyaza, Mortizak s’étonne :

[MORTIZAK] – Elle semble vous apprécier. D’habitude elle est plus farouche avec les inconnus.

L’homme ôte son chapeau et le tient à la verticale pour s’abriter des rayons du soleil qui commence à descendre au-dessus des toits. Puis il pointe son doigt vers le nord-ouest.

[MORTIZAK] – Vous voyez ? Là-bas, c’est le Temple de Solinthar. Nous y sommes presque.

Mais à contre-jour, Djirunyaza ne voit qu’une masse sombre dans la direction indiquée par l'ex-clown.

[MORTIZAK] – Depuis cette affreuse nuit, je n’ai pas eu de nouvelles d’Elsevier Gringlewald, l’illusionniste. Je ne pense pas qu’il se soit spécialement soucié du sort de Lilicia, leurs caractères étaient les plus opposés, il se chamaillait souvent avec elle. Peut-être est-il retourné dans sa ville natale, Salamonis. Ou alors peut-être est-il devenu apprenti. L’étendue de ses « pouvoirs » se limitait à faire des tours de passe-passe et à embrouiller l’esprit des gens avec ses beaux discours. Son rêve était d’être admis à l’école de Yore pour devenir un vrai magicien.

Quant à Félicius, l’acrobate, je ne sais pas non plus ce qu’il est devenu. Ce n’étaient d’ailleurs pas les seuls membres de ma troupe. Il y avait aussi Tripenfer le Troll, qui affrontait Rungo à la lutte à chaque représentation, et qui faisait aussi un numéro d’avaleur de… disons avaleur d’à peu près tout. Il y avait aussi Snoff, un Nain qui faisait une démonstration de tir de précision avec sa fronde. Et enfin Hippiline la Centauresse, remarquable danseuse de claquettes. Tous ont disparu. Il m’a été impossible de partir à leur recherche, puisque j’ai été banni de Sable Noir.

Mortizak danse d’un pied sur l’autre, sans trop savoir s’il doit marcher ou s’arrêter.

[MORTIZAK] – Oui, mon estomac crie famine. On dirait que vous n’êtes pas pressé d’arriver. Pourtant vous feriez mieux de ne pas trop tarder si vous souhaitez trouver où vous loger pour la nuit. Surtout si vous êtes sans le sou, en raison de votre vœu de pauvreté. A cette période de l’année, à l'approche de l'Epreuve des Champions, les logements valent de l'or, ils sont une source inestimable de revenus pour les habitants de Fang, l'offre est rare et les prix explosent… alors trouver un hébergement gratuit, voilà qui ne sera pas une mince affaire !