En forêt

[Machuthu]

Lucian s'éveille... A quelques pas, Yann dort encore mais montre lui aussi des signes avant coureur du réveil...

Les bruits qu'entendaient le cadet ne sont guères que celui des oiseaux qui chantent la nouvelle aurore...

[lucian]

Le jeune homme se redresse. Assis sur l'herbe humide recouverte de rosée, il balaye la clairière du regard. Tout est calme, les chevaux sont toujours là, broutant sereinement.

*Quel mystérieux songe... tout ceci semblait si réel...*

Il baille et s'étire un instant. Ses yeux se posent à nouveau sur le garde allongé près de lui. Il ne se souvient pas de la totalité de son rêve, quelques parties restent inexorablement tapies dans une chape de brume, imperméable à toutes ses tentatives pour la dissiper.

*Inutile de forcer... tout me reviendra avec le temps.*

Il se lève et se dirige vers Vädis. Il lui caresse l'encolure et lui parle d'une voix douce. Le cérémoniel matinal ne dure qu'une maigre minute puis il se retourne, et va ramasser près du feu une grosse poignée d'herbes sèches dont il se sert pour brosser la robe du cheval.

Je t'aurais bien emmené avec moi cette nuit. Si tu savais... c'était si étrange...

Il affiche un sourire amusé en constatant le regard de Vädis posé sur lui.

[Machuthu]

Le Cadet est soudain pris d'une violente crampe et manque de s'effondrer. In extremis, il est rattrapé par Yann qui vient de se lever. Le voyageur aide Lucian à s'asseoir et explique calmement.

Voilà pourquoi je ne voulais pas que tu outrepasses tes facultés... Que ce soit dans le Rêve ou dans le Réel, un tel événement laisse des séquelles... Crois moi, tu auras de terribles courbatures tout au long de la journée... De plus, j'ai bien peur que cela ne s'améliore que peu à peu au cours des prochains jours...

[lucian]

D'une certaine façon, les paroles du garde sont réconfortantes, au moins la douleur s'estompera avec le temps. Le cadet serre alors les dents en se relevant. Son regard se pose un long moment sur Yann dont l'inquiétude le touche beaucoup. Ce dernier lui témoigne plus d'attachement que son père n'en a jamais montré durant toutes ces années.
Puis il détourne les yeux pour fixer le faîte des arbres et reste ainsi, debout, sans prononcer un mot, replongeant au coeur de la tourmente. Ses souvenirs se mêlent en un tourbillon étourdissant ou le rêve et le réel se rejoignent.

Alors tout ceci est réellement arrivé... Je... Je regrette d'être parti sans vous faire part de mes intentions et d'avoir négligé vos avertissements. Le temps jouait contre nous, j'ai préféré choisir pour l'intérêt de tous, d'utiliser au maximum ce dont la source m'a fait don. J'avoue en avoir usé de façon inconsidérée mais j'en ai au moins tiré une leçon qu'il me sera difficile d'oublier.

Il sourit en grimaçant, l'intensité de la douleur fluctue à chacun de ses gestes. Lorsque ses muscles se seront réchauffés, elle sera plus supportable, du moins l'espère-t-il.

Que comptez-vous faire à présent ? Pour ma part, je comptais en apprendre plus sur ceci.

Il plaque sa main sur la petite bourse accrochée à sa ceinture, la détache et la donne au garde pour qu'il l'examine.

L'assassin de Maître Nohlam s'en est servi pour m'aveugler... Je ne pense pas que cet ingrédient soit très courant, ça devrait pouvoir me conduire sur une bonne piste.

[Machuthu]

Yann opine du chef...

Je vais te préparer un petit quelquechose à manger... Cela t'aidera à tenir... Ensuite, je t'aiderais à monter à cheval et nous pourrons poursuivre notre route... Je pense également que cette bourse sera la clé de l'énigme... Il est un herboriste à quelques lieues d'ici qui devrait pouvoir nous en dire plus...

[lucian]

Lucian rabat les pans de sa cape pour se prévenir de la fraîcheur matinale. Le frugal repas concocté par Yann avalé, il monte en selle, aidé par ce dernier. Il dirige ensuite Vädis, qui piaffe déjà d'impatience, vers la sortie de la clairière. L'herboriste n'est qu'à quelques lieues d'ici mais la chevauchée risque de rapidement devenir un calvaire avec ses courbatures. Il tente de se remémorer les zones d'ombres de son rêve afin d'obliger son esprit à faire abstraction de la douleur.

Je me posais une question au sujet des événements de cette nuit... Toutes ces personnes rencontrées... seront nous amenés à les croiser un jour ? Avons-nous réellement partagé ce rêve commun ?

Il patiente à l'orée du passage le temps que Yann le rejoigne, retenant les rênes de son cheval qui martèle le sol de ses sabots.

[Machuthu]

Yann rejoint Lucian et au grand soulagement de ce dernier laisse son cheval trotter doucement.

Non, nous ne rencontreront peut-être jamais les Rêveurs qui ont partagés avec nous ce Rêve. Par contre, le Rêve est effectivement commun à tous et chacun s'en rappellera, tout autant que toi, du moins.

Yann lance, un peu moqueur au vu des mimiques de Lucian sur son cheval...

Et m'est avis que tu n'es pas prêt d'oublier cette nuit, n'est-ce pas ?

Petit à petit, les mouvements de Vadïs échauffe les muscles du cadet et si la douleur est encore présente, elle apparaît plus supportable. Yann se décide donc de pousser un peu l'allure et tout en continuant à discuter, vous arrivez en vue du hameau dans lequel réside l'herboriste...

[lucian]

Le cadet met pied à terre. Il parcourt la maison du regard puis scrute la végétation alentour. L'endroit semble plutôt calme et le chant des oiseaux rassure le jeune homme sur une éventuelle mauvaise rencontre. Tout en s'approchant, rêne à la main, de la porte de la demeure, Lucian s'interroge sur l'apparence de cet herboriste. Il se l'imagine avec une longue barbe blanche et des cheveux en bataille, vêtu d'une longue toge mitée. Il sourit à cette idée mais à dire vrai, il n'a jamais croisé de tels personnages, que ce soit de près ou de loin. Tout ce qu'il sait d'eux est leur incomparable connaissance des plantes.
Il détache la petite bourse contenant la poudre grise, l'observe un instant puis reporte son attention sur Yann, tout en serrant fermement la main sur la toile grossière qui renferme l'une de ses meilleures pistes pour retrouver le meurtrier de Maître Nohlam.

J'espère que nous trouverons ici des indices au sujet de notre assassin...

[Machuthu]

A l'inverse de ce à quoi Lucian s'attendait, c'est un jeune homme qui ouvre la porte, une trentaine d'années à peine. Vêtu de vêtements simple tâchés de boue, il observe les nouveaux venus méfiant mais lorsqu'il reconnaît l'habit des gardes, il se rassure et les faits entrer...

S'informant sur le motif de leur venue, il accepte volontiers de les aider... Alors que Lucian lui montre avec précaution la bourse, il ne peut s'empêcher de remarquer l'expression de surprise de son interlocuteur...

Oh... Du gris de Balec...

Pour sûr, voilà qui n'est pas commun.

Relevant les yeux vers ses interlocuteurs, l'homme comprend rapidement qu'ils sont totalement novices en la matière et leur explique rapidement ce qu'il sait au sujet de ce 'Gris de Balec'.

Vous savez qu'il y a deux siècles, Lurion, deuxième du nom a décidé de faire construire la grande digue. Pour réaliser ce projet, il lui fallait de grande quantité de pierre à bas prix. Malheureusement, les carrières de notre royaumes ne permettent pas l'extraction rapide de telles quantités de pierres et Lurion ordonna qu'on fouille le royaume à la recherche de mine aisément exploitable.

Seule une mine dont on avait abandonné l'exploitation fut rouverte. D'une localisation proche du fleuve et d'un accès facile, son exploitation ne posait aucun problème et le roi ordonna qu'on y envoie plus d'une centaine d'ouvriers.

Pourtant, à la fin du premier mois, 95 ouvriers avaient péri, sans qu'aucune maladie n'aie été décelée, ni aucune blessure relevée sur leur corps. Immédiatement, on parla de malédiction divine mais Lurion ne voulait pas y croire. Il fit mander ses érudits sur les lieux afin qu'ils trouvent l'origine de ce mal étrange.

Au final, ce fut son herboriste qui perça le secret de la malédiction. Au creux des pierres de la carrière de Balec poussait un étrange lichen gris. Réduit en poudre, le champignon, inhalé devenait un puissant poison qui ne laissait que peu de chance à celui qui y était confronté.

Depuis ce jour, l'exploitation de la mine est interdite. Quand à cette poudre, peu d'herboristes acceptent de la réaliser car elle est aussi mortelle pour eux qu'elle ne le fut pour les ouvriers. Seuls ceux qui lui connaissent un antidote acceptent de la fabriquer.

Moi même par exemple, je ne suis pas en mesure de vous en fournir. Tout ce que je peux vous dire, c'est que les rares herboristes détenteurs de ce secret résident aux alentours de Balec. A quelques lieux à peine de Fort-le-kirkch.

[lucian]

Lucian affiche une mine sombre, les informations recueillies tendent à indiquer que l'homme qu'ils recherchent, fasse vraisemblablement partie de l'entourage du roi.

*Qui connaissait les vertus de cette poudre, hormis les herboristes royaux chargés d'enquêter sur le mystère de Balec... A ce jour, qui d'autre peut-être à même de mettre la main sur la recette d'un tel poison et de son antidote, à part quelques érudits affiliés à ces anciens dépositaires d'un savoir presque oublié ?
Il est à craindre que le meurtrier ne soit employé par une confrérie agissant pour le compte d'un noble de la cour, bien décidé à passer à l'action après toutes ces années de silence...*

Les récents événements peuvent corroborer cette hypothèse, Jack semble être en effet, la clef de voûte d'un complot sans nul doute destiné à mettre à mal le pouvoir en place... et même si tout ceci n'est qu'un rêve, le cadet en sait assez sur l'impact de ces songes pour qu'ils renvoient un écho tout à fait plausible de la trame qui se tisse en silence dans le réel.
Pour Lucian, il n'y a pas tellement d'options. L'assassin a agit sur ordre express d'une haute autorité pour empêcher l'académie de divulguer le contenu du parchemin. L'affaire semblait plus qu'urgente pour le pousser à se manifester ainsi, peu de temps après l'arrivée du messager, en plein coeur d'une zone aussi bien défendue qu'Elyodhra...
Le cadet saisit le bras de Yann et l'attire un peu à l'écart. D'une voix murmurante, il lui fait part de ses réflexions.

L'évêque était à l'origine de la missive destinée au doyen, il est logique de le considérer hors du coup. Cependant ce dernier a été assassiné si rapidement après en avoir prit connaissance, qu'il est juste de penser que le clergé soit infiltré... mais à quel niveau exactement ?
Le père supérieur d'Asthrion devait nourrir quelques soupçons sur les frères du prieuré pour me charger avec autant d'empressement de transmettre le message à notre recteur...
Balec et Asthrion semblent être nos deux meilleures et seules pistes. Il sera très difficile de questionner les gens à Balec sans attirer l'attention et encore plus difficile d'obtenir des réponses mais rien ne garantit que les choses soient plus simples du côté d'Asthrion...
Tout de même, je donnerais cher pour poser les yeux sur le contenu de ce foutu parchemin.

Il se tourne alors vers le jeune herboriste, conscient de ce que son attitude à d'offensant et bredouille une rapide excuse.

Vous disiez que les rares à connaître le secret de cette poudre se situaient aux alentours de Balec mais... connaissez-vous ne serait-ce que l'un d'entre eux ou à la rigueur un moyen de les joindre sans risque ?

[Machuthu]

L'herboriste sourit au propos de Lucian, visiblement, l'attitude du cadet ne l'a en rien choqué... Il faut dire que les gardes ne sont pas toujours aussi avenant et conciliants...

Vous avez de la chance Messire, j'ai étudié l'art de l'herboristerie auprès d'un initié de la capitale. Lui même ne connaissait pas le secret du Gris de Balec mais je connais le nom de deux herboristes qui peuvent vous renseigner.

Le meilleur des deux est sans nul doute, Jog Verprés, sa connaissance outrepasse de loin celle de biens des herboriste.
Le second est de Balec même et je ne me rappelle plus de son nom... mais tous là bas le connaisse sous le surnom de l'ancien.
Quant à Jog, vous le trouverez au village des quatre vents. Il y tient une échoppe réputée.

[lucian]

Murmurant de nouveau à Yann:

Hum... Si sa réputation est si grande, ce Jog Verprés pourrait bien attirer plus que de simples clients en mal d'un remède sûr... Ca peut également devenir un sérieux handicap pour qui désire utiliser son savoir en toute discrétion... Mais nous avons à faire à très forte partie et il est toujours possible de minimiser les risques par quelques moyens détournés...
Quant à "l'ancien", si son nom a su se fondre dans les brumes du temps malgré sa renommée, il y a une chance que le mystère qui l'entoure puisse faire les affaires de quelque obscur personnage...
Les deux herboristes semblent être donc aptes à nous révéler des indices intéressants, malheureusement, cela divise un peu plus notre champ de recherche...
Si l'on considère que depuis le début, cette histoire se déroule avec célérité et finesse, on ne peut exclure que l'un d'eux puisse faire partie du complot... Il y a toujours le risque de chantage bien sûr... nul n'est à l'abri de cette pratique et à en juger par l'efficacité du meurtrier de Maître Nohlam, il y a de fortes chances qu'il se soit procuré ce "Gris de Balec" par la manière forte...

Lucian croise les bras, l'air songeur. Le visage légèrement penché vers le sol, il scrute le jeune herboriste face à lui. Après une courte minute de réflexion, il relève la tête, visiblement perdu dans les méandres de cette intrigue qui ne cesse de le hanter depuis la veille.
Le temps leur fait défaut, il le sait. De plus, il serait risquer d'interroger les herboristes l'un après l'autre, sans éveiller les soupçons d'éventuels guetteurs, à l'écoute des importuns désireux d'en savoir plus sur cette fameuse poudre grise...
Le cadet se tourne vers Yann.

Les herboristes doivent être étroitement surveillés, nous devrions tenter notre chance chacun de notre côté. Avec un bon déguisement, une seule personne attirera moins l'attention que deux soldats, qu'en pensez-vous ?

[Machuthu]

Yann se masse le menton.

Te laisser seul ne m'enchante guère mais je sais combien l'ordre des Dragons s'applique à votre formation et je gage que tu sauras te défendre en cas de coup dur.

Je te propose donc de nous vêtir plus discrètement de faire route encore quelques temps de concert... Un voyageur seul risquerait d'attirer autant l'attention que deux gardes, les routes ne sont pas assez sûre pour cela.

Lorsque nous arriverons aux alentours de Balec, nous nous séparerons, l'un de nous ira se renseigner sur l'ancien, l'autre sur Jog...

Qu'en dis-tu ?

Et quel herboriste choisis-tu ?

[lucian]

Lucian acquiesce d'un signe de tête.

Très bien, nous continuerons ensemble jusqu'à Balec, en espérant que notre 'ami' n'ai pas eu l'idée de nous offrir une petite réception en cours de route... Il doit bien se douter que nous sommes sur ses traces même s'il ignore exactement les indices dont nous disposons. Il faudra rapidement nous dégoter une tenue adéquate pour passer discrètement en ville. Pour ce qui est de l'herboriste, je penche pour 'l'ancien'. La poudre a été découverte à Balec et cet homme dont seul le surnom a survécu à la mémoire des hommes m'intrigue.

D'un geste ferme, il tend la main au jeune herboriste.

Merci pour votre précieuse aide mon ami... Et si possible, j'aimerais que vous n'ébruitiez pas notre rencontre. J'espère que nous aurons l'occasion de nous revoir dans de meilleures circonstances.

Il lui sourit chaleureusement et quitte la demeure. Prenant un léger élan, le pied fermement calé dans l'étrier, il s'élance sur le dos de Vädis puis il ferme les yeux et inspire profondément avant de faire avancer le cheval au bout de la courte allée.

[Machuthu]

Rien que le fait de monter à cheval rappelle douloureusement à Lucian à quels points ses muscles sont douloureux...

Heureusement, il n'a pas eu le temps de se refroidir complètement et les élancements cessent vite. Yann reste discuter un peu avec l'herboriste et ce dernier va lui chercher un paquet à l'intérieur de sa chaumière. Cela fait, le garde paye le jeune homme et rejoint rapidement Lucian. Le garde explique laconiquement à Lucian qu'il s'agit d'un baume qui devrait favoriser son rétablissement.

Balec est à quelques heures de cheval et progressivement, les deux hommes accélèrent le pas sans toutefois épuiser leurs montures.

Les deux hommes échangent peu et traversent la contrée à la fois prudent et discret. Régulièrement, Yann opte pour une route détournée afin d'éviter les villes trop importantes ou les lieux prévisibles d'embuscade.

Deux nouvelles heures s'écoulent donc jusqu'à ce que les deux gardes parviennent au poste de garde qui sépare les deux contrées.

Nous voilà à quelques lieux de Balec et guère plus de Fort-le-kirkch. Passé le poste de garde, nous ferons route à part.

Le soldat qui monte la garde reconnaît immédiatement vos uniformes et ne vous pose aucune question. Il existe bien des avantages à être cadet d'un ordre aussi prestigieux.

Yann interroge alors Lucian.

Bien, nous voici passé et suffisamment proche de notre destination pour éviter de nous faire repérer... Poussons jusqu'au bosquet, là-bas... Nous verrons comment dissimuler un peu notre statut...