Ventsombre

Dalanyr respire par saccades dans le calme de l’aurore qui pointe son nez embrouillé entre les hautes façades de pierres sombres… Une atmosphère étrange se dégage de la place déserte. Elle l’enveloppe de son voile mystérieux, comme ses pensées d’un léger brouillard feutré…

Je ne m’habituerai donc jamais à cette curieuse sensation de fausse réalité, songe le Rêveur… Et pourtant cela me semble bien réel… La pierre sous mes pieds, cet air humide aux parfums marin qui m’interpelle comme une présence connue, cette eau qui murmure en des clapotis sonores en retombant allègrement sur les bords du bassin de la fontaine en cuivre vermoulu… et ces bottes de randonné fortement lacées qui m’enserrent un peu trop les chevilles… Tout cela est bien réel… et pourtant j’ai encore une certaine appréhension devant ce fait accompli…

Le jeune voleur marche vers la fontaine. L’eau cristalline éclabousse les pierres toutes proches en gouttelettes moqueuses… Il fourre une main dans sa poche et fait sonner sans avertir les piécettes qui s’y cachent… Le son familier qu’elles émettent le rassure davantage… Il est toujours vivant… Tout est vrai ! murmure-t-il tout bas en croyant se convaincre un peu plus… Mais un doute persiste… Il manque une présence à ce rendez-vous… Il est seul… Où à bien pu atterrir le géant ?

Il avance sa main et touche l’eau froide du bout de son doigt qu’il sent glacé… comme si toute forme de vie l’avait quittée… Serait-ce un simple rêve des plus ordinaires bougonne Dalanyr ?

Un bruit de pas lourds résonne soudain sur le pavé… Il se retourne sans se presser. Une lueur pétillante fait briller son regard. À la fois ravi et rassuré de reconnaître la carrure spectaculaire du géant qui se découpe sur le pavé de la ruelle encore à l'ombre, il fait rouler du bout d’un pied nonchalant un petit caillou aux arêtes aiguisées, oublié sur la pierre… Un bruit sourd claironne nerveusement à ses oreilles…

J’te l’avais bien dit qu’on s’retrouverait facilement !

Sylas se retrouve facilement dans le monde du Rêve, c'est d'autant plus facile qu'il sait que quelqu'un l'y attend pour le conduire.
IL se retrouve avec Dalanyr en ayant l'impression de flotter dans une autre réalité. Mais n'est ce pas le cas !!!

En venant jusqu'à son compagnon le géant a pu se rendre compte de la réalité de ce monde. Tout d'abord la porte, il a fallu la pousser comme dans la vie et le grain du bois s'est fait sentir sous ses doigts.
La ruelle, la ville, la fontaine tout cela semble si réelle, est ce que cela ne l'est pas après tout ? Pourquoi se poser autant de questions ?

Sylas remue la tête pour rejeter ses inquiétudes et se dirige d'un bon pas vers la fontaine dont il sent déjà la fraîcheur en ce petit matin.
Par pur acquis de conscience, il trempe sa main dans l'eau. Il s'en passe sur la figure et regarde Dalanyr de toute sa hauteur.

Un sourire éclaire le visage du géant, suivi d'un rire sonore qui se transforme en fou rire, le faisant pleurer de joie. Il se tient les côtes et au passage se rend compte qu'il porte celle qu'il a passé tant de temps a fabriquer : son épée.

- Alors et maintenant on part en exploration ou on reste toute le journée, ou nuit, devant cette fontaine.

Sylas jette un coup d'œil à Dalanyr et lui dit :

- A part les rêveurs il n'y a personne à entendre ici, non ?

N'attendant même pas la réponse de jeune homme il se précipite la main sur la garde de son épée en direction des cris.

(Avec la chance qu'on a, on va encore tomber sur une femme envoutante te captivante ! Tant pis de toutes façons je ne peux rester inactif !)

Le géant court mais en restant attentif à ce qu'il se passe autour de lui afin de ne pas se faire surprendre s'il s'agissait d'une embuscade. Dalanyr lui a bien dit que les rêveurs sont avant tout des humains, donc on peut tout attendre d'eux : du bon comme (et surtout) du mauvais.

Un cri chargé d’une forte intensité émotive fait quasiment redresser les cheveux du jeune voleur. Le son aigu frappe les oreilles du Rêveur comme un coup de gond strident sur la peau d’un tambour. Il résonne encore dans la tête de Dalanyr lorsqu’il voit Sylas partir en courant, la main sur le pommeau de son épée…

N’ayant pas eu l’opportunité de répondre à son compagnon, il part au pas de course… Il se convainc qu’il apprendra bien par lui-même, que dans le Rêve, rien n’est aisé, comme dans la vie ordinaire… Mais une sensation désagréable s’insinue en lui… Subtile au début, elle se transforme rapidement en craintes plus palpable, puis en une peur bien réelle… De quelle manière va réagir le géant… Son manque d’expérience va-t-il lui faire commettre une bêtise impardonnable ? S’il lui arrivait quelque chose de dramatique, il ne se le pardonnerait pas. Il se sentait presque responsable de la sécurité de Sylas. L’expérience avec Main-Leste lui laissait encore un goût amer dans la bouche et il s’en voulait… Il finit cependant par se dire qu’il ne pouvait lutter outre mesure contre l’inévitable… Bien qu’il en soi tout à fait conscient, il savait avec certitude qu’il ne pouvait pas retourner en arrière, même si à l’occasion ce désir l’obsédait. Cette idée saugrenue le surprenait toujours et devenait presque une obsession.

Son rythme de course était tel, qu’en peu de temps, son pas s’accordait à ceux du géant. Il eu alors l’impression d’être son ombre…

Le bruit sourd que faisaient leurs pas sur la pierre vagabondait entre les rangées serrées des bâtisses. Il songea dans cet instant de silence intérieur, que les attaquants, s’ils étaient plusieurs, auraient déjà pris la fuite à leur approche bruyante…

Il laissa à son tour sa main retrouver la garde de son épée, tout en lançant d’une voix haletante à Sylas afin que lui seul entende…

Prépares-toi ! S’il arrive quoique ce soit, nous sommes deux… Le sang affluait de plus en plus à ses tempes sensibles… Il se savait prêt à l’affrontement…

Votre course effrénée vous amène bientôt face à une jeune femme brune qui paraît complètement paniquée... Elle observe fixement une fenêtre non loin d'elle...

Dès qu'elle avise votre présence, elle court vers vous...

Rapidement, Dalanyr perçoit la carte que la jeune femme porte à la main... D'une vingtaine d'année, cette belle représentante de la gente féminine, à l'apparance d'une bohémienne s'arrête à quelques mètres de vous et vous demande de l'aide...

Elles l'ont emmenées... Je n'ai rien pu faire... Il faut m'aider... Vite... C'est par ici...

La jeune femme se dirige vers la fenêtre qu'elle regardait fixement à l'instant et se retourne pour s'assurer que vous êtes prêts à la suivre...

Les yeux sombres de la jeune femme lance un éclair de détresse. Ses cheveux en boucles aux chauds reflets d’un roux-auburn tombent en cascades folichonnes sur ses épaules qui laissent voir des sursauts à première vue incontrôlables.

L’allure presque féline de cette apparition inattendue trouble le voleur. Ses bras recouverts d’un châle orangé, ourlé d’une frange brillante d’un vert émoussé se prolongent par des mains aux longs doigts parsemés de mouvements involontaires. Baissant le regard, il observe une énigmatique feuille de papier…
Quel étrange situation !… murmure-t-il, tandis qu’il songe à la déesse et à la carte conduisant à son repaire.

Arrivé à la hauteur de Sylas, il cherche son regard afin de savoir ce qu’il pense de la situation. Puis mu par le désir de lui venir en aide, je lui demande d’un ton pressé…

Alors ! On fait quoi ?

Sylas n'est pas homme à refuser son aide à une jeune femme en détresse et bien que leur précédente rencontre dans le Réel l'ai quelque peu refroidi, cette jeune femme n'a rien de semblable avec la manipulatrice qui cherchait à vous emprisonner dans sa toile... Fermement, il finit par acquiescer à l'intention de Dalanyr... Oui, ils vont y aller, s'engouffrer dans l'aventure du Rêve...

La jeune femme ouvre alors le portail dissimulé par la fenêtre et jette un oeil vers Dalanyr et Sylas...

Dépéchez-vous, je ne pourrais pas le tenir ouvert bien longtemps...

Dalanyr se souviens que Main-Leste lui avait parlé d’un Portail, un genre de passage conduisant à un autre monde du Rêve…

Pourrait-il s’agir de cette ouverture magique traversant le temps et l’espace dans le Rêve ? se demanda le jeune voleur en s’approchant de la jeune femme aux yeux encore suppliants. Ne percevant dans le regard qu’elle pose sur eux rien d’anormal, il lui demande…

De quoi s’agit-il ? Est-ce un raccourci magique entre deux mondes au sein du Rêve ?

Cherchant le regard de Sylas, qui restait sans voix, il poursuit…

De quelle manière pouvons-nous vous apporter notre aide ?

(Quelle est donc cette femme ? Une carte ? Mais de quoi parle-t-elle ? Une fois de plus je ne comprends pas grand chose !Il me faut vite apprendre. Il est sûr que l'on ne peut rester sans l'aider !)

Sylas regarde Dalanyr, au question du jeune homme il ajoute les siennes.

- Qui a emmené qui, ou quoi ? Vers où allons nous ?
Nous sommes là pour vous aider, que pouvons nous faire ?

La jeune femme s'impatiente...

Bien sûr que c'est un portail... Que voulez-vous que ce soit ?

Je vous en prie, dépêchez-vous, je vous expliquerez tout de l'autre côté...

Sylas est bien conscient que cela pourrait être un piège mais en son âme et conscience il s'avance vers le portail la main sur son épée.
Il s'attend à découvrir un autre endroit comme le lui avait expliqué Dalanyr ainsi il garde ses sens aux aguets afin de ne pas se laisser surprendre par ce qu'il va se passer en traversant le portail.

En passant devant la bohémienne, il en apprécie la plastique et sans un mot progresse vers l'inconnu.

(Au point où j'en suis, une nouvelle aventure dans la même journée ne pourra plus me faire de mal. Il faut que je m'y fasse ma vie bien réglée est finie. Peut-être est ce un bien ? En tout cas il me la reste à vivre ce qui est déjà pas mal !!)

(hrp : Rdv sur le sujet : Royaumes sauvages... )