Arrivée de Tristan au caern. Rencontre avec sa meute.

[Zoorin]

Pendant que Alexandra finit d'exposer ce que sont les garous à un Tristan un peu étourdi par tant de révélations, la voiture entre dans le parc de Vincennes et se gare rapidement près d'un lac. La jeune femme, qui a donc révélé être elle aussi un garou, et faire partie d'un groupe, un "caern". Apparemment, on l'attend, et on l'a sorti d'un laboratoire qui fait des expériences sur des personnes comme lui. Et surtout, elle l'a répétée au moins dix fois durant le voyage, Il va trouver sa place avec ses frères de sang et être heureux, avec un vrai but dans la vie.

Tristan est sceptique, pas sur la réalité des autres garous ou sur le fait que la clinique était un laboratoire d'expérimentation sur des êtres surnaturels ; mais surtout qu'il puisse être réellement heureux avec eux.

Enfin, il verra.

Les deux heures de route ont un peu ankylosé Tristan, qui s'étire en sortant de la voiture. Il fait beau en cette fin mai, et cette fin de matinée est radieuse. Les promeneurs sont assez nombreux, et le parc verdoyant.

Alexandra sort les affaires de Tristan du coffre, les mets sur son dos, et lui dit :

Suis-moi, allons tout de suite voir les autres.

[Khelren]

D'accord. Puis enchaînant tout de suite: Il y a combien de personne en tout dans ce ... caern?

Ils ne vont pas être ... heu... hostiles envers moi? Je veux dire: ils ne sont pas obligés de m'aimer. Ils peuvent me trouver bizarre ou impur ou quoi que ce soit d'autre. Je débarque sans rien connaître à tout ça. Je sais pas comment agir, comment me comporter...

Et d'une petite voix timide:

Et puis, faut-il vraiment me présenter? à tout le monde? en même temps? J'ai un peu de mal face à des groupes de gens. Je risque d'être... renfermé, disons.

[Zoorin]

Manifestement, Alexandra comprend la gêne de Tristan. Elle cale mieux le gros sac sur son dos et lui indique de la suivre de la tête. En chemin, elle reprend :

En tant que Garou, ou plutôt de louveteau, tu dois te présenter au moins à un des anciens ou à un personnage important du sept. Mais par la suite, si tu veux, tu pourras rester à l'écart et t'insérer progressivement. Tu n'es pas obliger de venir à nos fêtes, même si ce serait mieux. Enfin, comme je t'ai expliqué, il faudra bien que tu fasses partie d'une meute. Mais une meute, c'est comme une bande de copains, donc ça devrait aller.

Ils marchent le long du lac et arrivent jusqu'à un pont de ciment menant à l'île de Reuilly. Tristan, à la vue des parisiens nombreux en cette belle journée de mai, enfonce sa tête dans ses épaules, mais dans les coups d'œil qu'il lance à droite et à gauche, il s'aperçoit que personne ne le regarde particulièrement. Devant cette indifférence, il se détend un peu.

Et puis, tu verras, l'ambiance est plutôt bonne enfant actuellement. Comme je te l'ai dit, nous venons de réussir une grande victoire, et les esprits sont à la fête. Bien sûr, d'autres sujets de préoccupation subsistent, mais les gens que tu vas rencontrer seront dans un bon état d'esprit.

Ils arrivent jusqu'à un bosquet d'arbres et un autre pont, datant manifestement de la création du parc, avec des rambardes et des pylônes ornés. Alexandra s'engage sur ce deuxième pont menant à l'île de Bercy. Une pancarte indique pourtant : "Pépinière expérimentale du Parc de Vincennes. Entrée interdite au public."

Tristan lève la tête et regarde le but de son voyage, là où il va vivre durant un certain temps. C'est une île entourée de haies et d'un grillage, et supportant une forêt dense. Cela ne lui fait l'impression d'être une pépinière, mais plutôt un coin laissé à l'abandon depuis cent ans. De l'autre côté du pont, une grille ferme l'entrée et une toute petite maison, semblable aux maisonnettes de gare, se tient tranquillement, semblant attendre justement les visiteurs.

Alexandra arrive près de la grille et appelle :

Hé ho, il y a quelqu'un ?

Peu après, un jeune homme étrange en sort. Habillé d'un pantalon trop large et tenu par une corde, il est torse nu et porte un bonnet marron un peu ridicule. En voyant Alexandra, il se fige, fait un grand sourire et écarte les bras, lançant :

Te revoilà enfin, tu nous as tous beaucoup manqué !

Il éclate de rire et se dirige vers le portail en sortant une clef de sa poche.

Alors, c'est lui Tristan ? * ouvre le portail et à Tristan * Bienvenue à toi, frère de sang, bienvenue. Bon voyage ?

Tristan est sidéré par un tel accueil. Le visage du jeune homme respire la joie de vivre et la bonne humeur. Il est manifestement sincère quand il lance ces bienvenues et lui serre vigoureusement la main. Or, jamais personne n'a accueilli Tristan de cette manière. C'est la première fois qu'il n'y a aucune pitié dans la voix ou l'attitude de celui qui lui adresse la parole. Cet inconnu semble simplement heureux qu'il soit là. Cela fait un bien fou à Tristan, mais il ne sait pas comment gérer cette bouffée de sensation positive qui lui montent de l'estomac pour lui nouer la gorge.

[Khelren]

Heu... merci... pas mal mouvementé le voyage. Et... surprenant, disons...

Et Tristan bredouille quelque chose d'incompréhensible, à mi-chemin du merci qui êtes-vous et du vous n'avez pas peur que les infirmiers viennent me chercher ici.

[Zoorin]

Allez, venez tous le deux, vous devez avoir soif ! J'ai du jus de pomme et de poire fermier venant directement du producteur, de la Loire.

Il referme le portail et emmène les deux arrivants dans la petite maisonnette. Passé la porte, ils entrent directement dans une petite cuisine sortie tout droit des années 50, avec la toile cirée rouge et blanche sur la table et un aménagement grossier mais solide. Tristan se croirait en pleine campagne.

Vous avez fait bonne route ? Remarquez, à cette heure si, il ne doit pas y avoir grand monde.

Le petit escogriffe parle beaucoup en leur donnant des chaises, des verres et à boire.

Au bout d’un moment, Alexandra éclate de rire en plein milieu d’une phrase pas drôle, ce qui coupe net leur hôte.

Mon cher, tu es toujours incroyable. Tu ne t’es pas présenté, ce n’est pas très poli. * sans lui laisser le temps de reprendre la parole, elle se tourne vers Tristan * Ce bavard indécrottable se nomme Tortue-pas-géniale. Ce n’est qu’un surnom, bien sûr, mais comme je te l’ai expliqué, en devenant un loup-garou à part entière, on change de nom pour en prendre un qui reflète notre personnalité, ce qu’on est.

Tortue-pas-géniale, après être devenu tout rouge et avoir bafouillé des excuses, lance :

Oui, bon, excuse-moi, Tristan, mais ces derniers jours ont été mouvementés, et je n’ai plus toute ma tête à moi.

Il tend une panière de petits gâteaux secs faits maison à Tristan pour se faire pardonner.

[Khelren]

Merci. Ca me change de la nourriture de l'hôpital, dit-il sans réfléchir.

Tristan s'arrête comme s'il venait d'avouer son crime. Il reprend très vite:

Mouvementé, c'est rien de le dire... Heu... Ca fait longtemps que vous savez... que vous êtes... des... enfin, vous voyez? Tous les deux?

[Zoorin]

Tortue-pas-géniale regarde Alexandra, qui répond :

Oui, cela fait un certain temps, plusieurs années pour nous deux. Mais nous avons tous eu des parcours différents pour accomplir notre première transformation, avec chacun nos déboires.

Tortue-pas-géniale rit un bon coup :

Oui, et d'ailleurs, les deux autres nouveaux qui sont arrivés juste avant vous en ont connu une particulièrement mouvementée. * Alexandra lui lance un regard surpris, auquel il répond * Oui, il s'agit des deux jeunes surveillés par la meute de Brouillard Glacé, Walan et Nico. Yvan les a accompagné pour aller voir Danse-avec-la-Mort.

Alexandra le coupe encore une fois :

Il est là ?

Oui, …

Bon, alors il ne faut pas attendre. Tristan, il faut que tu rencontre notre Maître du Rite, Danse-avec-la-Mort. Suis-moi.

Elle se lève et dit à Tortue-pas-géniale de garder les affaires de Tristan. Pendant ce temps, ce dernier se dit qu'il n'a pas très envie de rencontrer quelqu'un doté d'un tel nom. Rien qu'a y penser, cela lui donne des frissons. Il se lève néanmoins, bien conscient qu'il est bien trop tard pour reculer.

[Khelren]

Après avoir fait quelques dizaines de mètres, se sachant inaudible de Tortue-pas-géniale, Tristan lance:

Il a l'air sympa Tortue-pas-géniale... J'imagine que ça ne va pas être le cas de ce Danse-avec-la-Mort. Il est aussi dingue que moi pour avoir un nom pareil, non?

[Zoorin]

Alexandra lance un regard étonné, puis sombre à tristan.

Non, Danse-avec-la-Mort s'appelle ainsi car il a vécu des choses horribles avec sa meute, ses meilleurs amis. Tortue-pas-géniale est nommé ainsi car il n'a pas encore compensé ses bourdes mémorables par des exploits à la hauteur. Il changera de nom un jour ou l'autre, c'est évident. Quant à Danse-avec-la-Mort …

Elle reste songeuse puis lance, sur un ton glacial qu'il ne lui a jamais entendu :

Respecte-le, c'est certainement le meilleur loup-garou du caern.

Conscient d'avoir fait une mauvaise comparaison, Tristan se tait et en profite pour regarder autour de lui.

Il traverse une forêt presque naturelle, sans alignement ni tuteur. Il se dit que c'est bien le fouillis pour une "pépinière expérimentale". A de nombreuses reprises, il voit des écureuils, des souris, des lézards ; et de nombreux petits animaux blancs au corps allongé.

Il n'a pas le temps de mieux regarder ou de demander car ils arrivent dans une grande clairière de terre battue à l'autre bout de laquelle un monticule de terre abrite l'entrée d'un tunnel. Un homme est assis sur le monticule, en train de lire. Il lève les yeux et regarde les arrivants d'un œil interrogateur. Petit, solide et musclé, il a le visage orné d'une cicatrice. Vêtu de cuir avec des bracelets clouté, chaussé de bottes ferrées, il a le crane rasé et un bouc assez long.

Alexandra lui envoie sur un ton froid et rigide :

Bonjour Yvan-Tornade-de-Paix. Je te présente Tristan, louveteau que je vais présenter à Danse-avec-la-Mort.

Yvan-Tornade-de-Paix arbore lentement un sourire en coin et lance, faussement ironique :

Bonjour belle louve Alexandra * elle se raidit * Voici donc celui que l'on n'attendait plus. * Tristan lève les sourcils, surpris * Sinon, dommage pour toi, mais notre Maître du Rite vient de sortir pour je ne sais pas où. * accentue son sourire * Mais si tu veux, il y a ton bon ami Yvan tout court avec deux autres louveteaux en bas. Ce serait une bonne idée qu'ils fassent connaissance, non ?

Sans laisser le temps à la jeune femme de répondre, il saute du monticule en lançant :

Bonjour cher Tristan ! * se dirige vers lui et lui tend la main * Ravi de faire ta connaissance.

Yvan-Tornade-de-Paix lui fait un grand sourire, que Tristan trouve carnassier.

[Khelren]

Tristan se raidit, se faisant aussi grand que possible. Il lui tend la main et lui serre assez fort, sans même s'en rendre compte. Son regard ne laisse rien transparaître mais on sent une certaine froideur.

Instinctivement Tristan ne l'aime pas. Il sent chez lui quelque chose de faux et de méprisable, choses qu'il déteste par-dessus tout. Et surtout il n'aime pas la façon dont il parle à Alexandra.

Salut.

Et son regard reste ancré dans celui d'Yvan-Tornade-de-Paix.

[Zoorin]

Durant un court moment, Yvan-Tornade-de-Paix soutient le regard de Tristan. Son visage prend une teinte de surprise, puis de défi, avant très vite de virer à une expression neutre. Lâchant la main :

Bon, on aura le temps de faire plus ample connaissance, va donc visiter le caern.

Alexandra, toujours rigide, fait signe à Tristan de le suivre, ce qu'il s'empresse de faire. Alors qu'ils entrent dans le tunnel, Yvan lance un dernier :

Apprend lui nos coutumes, Alexandra, et surtout nos lois de la hiérarchie. Il en a besoin !

Alexandra prend le bras de Tristan, manifestement dans la crainte qu'il ne pique un coup de colère. Mais Tristan est trop sidéré par ce qu'il voit.

Les parois du tunnel sont ornées de peaux peintes entourées de bois sculpté ou de pierre gravée. Il y en a un grand nombre. Il reconnaît des scènes de chasse, de bataille, des cérémonies, et des portraits. Les dessins sont réalisés selon des styles variés, et certaines peaux sont craquelées et ont l'air très anciennes.

Le tunnel descend en tournant sur la gauche, et est éclairé par des lanternes étranges. Leur armature de fer forgé est sculptée de manière à ce que les tâches de lumières forment des dessins sur les murs. La plupart du temps, il s'agit de personnages, de saynètes, de symboles et d'allégories. Tristan est également surpris par la lumière produite par les bougies.

Mais surtout, très vite dès qu'il entre dans le tunnel, il remarque des dizaines de petits museaux sortant de petits trous. Plein de petits animaux blancs sortent prestement de leur cachette, le fixent puis disparaissent en un éclair dans leur terrier. Dans le silence du tunnel, uniquement troublé par leurs pas et leur respiration, les petits bruits des petits animaux sont une sorte de rythme ténu et frêle.

Alexandra le regarde, et sourit quand elle remarque sa surprise.

Notre entrée est particulière, n'est ce pas ?

[Khelren]

Mais superbe...

Il se tait un moment pour contempler le tunnel. Même en parlant, il continue de regarder autour de lui. Ses yeux brillent dans la pénombre.

J'aime cet endroit. Je sens que je pourrais m'y plaire. Mais j'imagine que c'est comme partout pareil: il y aura aussi des choses ou des personnes qui ne me plairont pas.

Il regarde intensément Alexandra, avec beaucoup de sérieux et sa voix se veut rassurante.

Je n'allais pas me jeter sur lui. Je suis dingue mais pas fou. Je ne l'apprécie pas, c'est tout. J'ai senti, derrière un masque de bonté, que se cachait une forme de méchanceté. C'est juste quelqu'un que je ne sens pas, pas un être impur ou je-ne-sais-quoi selon vos termes.

Et subitement, il explose d'un rire franc et presque enfantin:

C'était qui, d'ailleurs? Le grand patron? Je n'arrête pas de faire des gaffes, hein? Je suis désolé. Ce sont des réflexes des bas-fonds que j'aurai dû mal à perdre. Soit je les apprenais, soit j'étais un homme mort, alors...

Je vais essayer de me tenir un peu plus à présent. Sinon, ça pourrait vous attirer des ennuis, non?

[Zoorin]

Lui, c'est un des gardiens du caern. Il est plus bas que moi dans la hiérarchie des loups-garous, mais il n'aime pas ceux qui ne cherchent pas à résoudre les problèmes à sa manière : en frappant. Mais ne parlons plus de lui, la situation entre nous est compliquée. Profite de ton arrivée ici.

Elle se rapproche d'une paroi, et tend la main vers un animal en disant :

Voici l'un des symboles de notre caern. * l'animal se caresse à sa main * Comme je te l'avais expliqué, notre totem est Hermine Blanche. Elle s'incarne dans notre monde à travers les membres de son espèce. * plusieurs hermines viennent sentir les pieds de Tristan tout en restant craintives * Mais elle est peut être là, à nous observer. Comme je te l'ai expliqué, il est possible de voir à travers le goulet pour certaines personnes ou certains esprits. Et de nombreux esprits nous aident dans notre lutte ou simplement dans notre vie. * tourne la tête et le regarde dans les yeux * Tu apprendras, toi aussi, à leur faire confiance et à suivre leurs avis. Même quand ils sont obscurs. * sourire *

Bien, allons rencontrer les autres louveteaux.

Elle reprend la descente.

[Khelren]

Quel est votre rôle dans ce caern? Vous ne me l'avez toujours pas dit...

[Zoorin]

Moi ? Aucun. Je suis membre d'une meute qui, elle, a un rôle. Moi seule, je n'en ai pas. Tu verras, les loups-garous vivent en meute, c'est leur nature. Seul, ils sont sans force et même sans vraie raison de vivre.

Après une descente assez longue, ils arrivent dans un couloir droit encore plus large et haut de plafond que le tunnel. Contre les murs, de grandes dalles de pierre dont certaines montent jusqu'au plafond sont gravées de scènes de guerre, de paix ou très oniriques. Au bout de ce large couloir, un grand rideau de velours brun barre l'accès à une grande salle dans laquelle une personne parle. Alexandra sourit et se tourne vers Tristan :

C'est Yvan.

Elle écarte un lourd pan du rideau et entre, tenant le rideau pour faire passer Tristan.

Ce dernier s'arrête, sidéré.

Le plafond haut perché est entièrement caché par un entrelacs d'immenses racines partant du centre de la voute. Ces racines descendent le long de pilier entourant la salle centrale, et le long des murs, s'enfonçant ensuite profondément sous terre. Tristan se sent écrasé par l'arbre géant qui le surplombe, se demandant s'il ne va pas s'effondrer sur place, les écrasant.

Cet effet est particulièrement accentué par les lumières des candélabres disposés de ci de là et des lanternes pendant des racines. Le plafond est composé d'une multitudes d'ombres mouvantes, donnant vraiment l'impression que des centaines de tunnels y partent. En se concentrant particulièrement dessus, Tristan remarque plein d'hermines. Celles-ci ne restent jamais en vue longtemps, sautant d'une racine à un coin d'ombre.

Sur la droite, près d'un pilier, trois personnes discutent assises sur des bancs. Elles se lèvent pour le voir.

Alexandra s'avance, apparemment ravie de voir le plus grand et costaud d'entre eux, un géant aux cheveux courts.

Yvan !

Alexandra !

Yvan à l'air lui aussi très content de voir Alexandra et les deux se font une longue accolade. Puis, Yvan s'écarte et saisit Alexandra par les épaules.

* Yvan * He ! Ca fait du bien de te revoir. Ca c'est bien passé ?

* Alexandra * Très bien finalement, mais je te raconterais plus tard. * se retourne * Approche, Tristan.

Yvan fait de même, faisant un signe aux deux autres qui viennent les rejoindre.