L'arrivée de José à Paris

[Zoorin]

Le propriétaire ouvre la chambre et entre. José le suit et regarde l'appartement. Bon, on l'avait prévenu que c'était petit, que Paris c'était cher et que pour être bien situé, il faut viser petit.

"Bah, pas grave, j'ai l'habitude. Et puis les difficulté, ça me motive."

Il passe rapidement sur le lit qui grince, au milieu de l'unique petite pièce, sur le lavabo antique, sur la douche dans un placard, sur une penderie juste suffisante pour les affaires de ses deux valises et sur les toilettes sur le palier, sans poignée pour fermer et sans ampoule.

Il dit au proprio que c'est très bien, qu'il remercie encore Mme Martin pour son loyer vraiment bas, et referme la porte. Il s'appuie dessus, poussant un soupir de soulagement. Son bavardage devenait insupportable. Puis, il regarde devant lui la porte-fenêtre menant à son petit balcon.

Il sourit.

Il jette sa veste, ouvre brusquement sa fenêtre, va sur son tout petit balcon et lève les bras au ciel. Il regarde autour de lui, la Sorbonne à sa droite, Notre Dame de Paris devant, avec la basilique de Montmartre derrière, sur sa gauche, le Louvre. Il se tourne sur sa gauche encore et se lève sur la point des pieds. Il ne peut pas apercevoir l'assemblée nationale, le palais Bourbon ou la Défense.

Mais il s'en fout.

"PARIS, tu es à mes pieds." Hurle-t-il dans sa tête, serrant la rambarde à s'en briser les os.

[Okka Perce-Feuille]

Une petite brise souffle dans la chambre. L'air chargé de gasoil et des odeurs finissantes du temps de midi dans les snacks s'insinue dans la chambrette. Décidément tout ici respire l'ailleurs.
*Songeur*

Déjà le temps des certitudes est passé sur la ville et dans son coeur. Le petit train train au milieu de ceux pour qui il n'avait plus grand chose à prouver est resté là-bas avec sa famille d'accueil et les copains de l'ecole. "HEC, c'est une usine à Chefs, tu sais", lui disait son prof. tant mieux finalement, la vie ne ma rien donné, je devrais lui arracher jusqu'au dernier de ses avantages. Il faudra s'y faire une place au Temple, avec mon accent belge à couper au couteau et mes références à la con, ça ne sera pas facile.

"En fait, j'ai tout du petit provincial un peu bourrin".

"D'abord passer à la Fac pour signaler mon arrivée et prendre un peu possession des lieux, ensuite trouver un chtit boulot, j'ai de l'expérience pour les trucs sous-payés à statut précaire. Et puis merde, je suis belge, ils vendent quand même bien des frites dans ce pays...??? le mieux c'est de demander aux voisins"

Après avoir défait sommairement ses bagages, José sort de sa mansarde pour contempler les six étages qui le séparent du sol *soupir prémonitoire, le premier d'une longue série*. José se rappelle les considérations hautement informatives du proprio "Rez-de-Chaussée, la concierge - faites gaffe à vos poubelles - aux premiers, second et troisième, des vieux et des familles - le silence est une priorité dans cet immeuble, M. Sanfreuil - et puis des students, des artistes, bref à peu près tout ce qui peut faire son deuil de l'ascenseur de l'époque de Raymond Coty, boulonné au sol depuis bientot dix ans.

Palier, porte à gauche, sonnette: Driiiiiing

Salut je m'appelle José je suis votre nouveau voisin...

[Zoorin]

Un jeune homme vêtu d'une jaquette noire venu d'un autre âge et d'un chapeau melon ouvre des grands yeux assortis de poches manifestant un flagrant manque important de sommeil. Il est mal rasé, à les yeux vitreux et le tain très pâle. Son visage rond et ses joues rebondies lui donnent toutefois un air immédiatement sympathique. Son appartement est rempli de tableaux, de palettes, de carnets de croquis ouverts, de papiers par terre. José se surprend à remarquer que cela ne sent ni la cigarette, ni d'autres substances à fumer. Par contre, il remarque par terre sous une table trois bouteilles de vin vides.

Après avoir marqué un temps d'arrêt, le bonhomme tend une main raide mais franche.

Bonjour voisin, je suis Julius Pinkas, apprenti peintre et dessinateur. Et vous même ?