Oona : L'étang, la terre et le ciel

[Oona]

Puis elle se ressaisit en se remémorant ses propres paroles, qu'elle répète d'ailleurs à haute voix :

J'ai dit que je le ferais. J'ai dit que je libérerais les flots. Même si cela me prend la journée, ou la semaine, je permettrais au courant de traverser nos terres à nouveau.. Car sans lui, nous sommes affaiblis.

Le moral un peu remonté par ce petit discours et les réminiscences de son rêve étrange, Oona s'attèle à la tâche avec les maigres outils qu'elle possède. Consciente qu'il lui faudra beaucoup de force et d'endurance pour réussir, elle prend sa forme de Crinos et attaque le travail.

[Machuthu]

Fort heureusement, la forme Crinos offre bien des avantages et en quelques heures, la mousse verdâtre est entassée un peu plus loin et l'Uktena commence à s'attaquer à la vase...

Oona réalise alors qu'en déplaçant la pollution et en l'entassant de la sorte, elle risque de provoquer un autre déséquilibre...

Et puis, la mousse, la vase, ok, mais pour ce qui est des moustiques et des pauvres poissons, elle voit assez mal ce qu'elle peut faire...

Une chose à la fois, la gaillarde s'attache à trouver une solution pour la vase...

[Oona]

Elle marque une petite pause et réfléchit.

Je peux pas me permettre de laisser ça moisir ici... Se dit-elle en regardant la mousse. Et je peux pas me contenter de poser la vase à côté, si tant est que je trouve un moyen pratique pour la sortir de là...

Peut être que si je trouve un gros conteneur, ou quelque chose d'approchant, je pourrais ramener la mousse et la vase ailleurs, dans un endroit ou ça ne polluerais pas...

Elle hausse les épaules, et ne sachant que faire d'autre, elle regarde autour d'elle et fouille un peu, voir si quelque chose ne pourrait pas convenir et faire office de "réceptacle à saletés".

[Machuthu]

L'ancien Gardien de la terre faisait quand même un peu son travail... Nul bidon, nul récipient... Oona fouille sa mémoire pour se rappeler se que ses pères feraient en de tels cas...
Les végétaux, ils les brulaient, mais la vase demeuraient. Avec de faibles quantités, ils pouvaient encore la faire sécher et s'en servir comme engrais, mais là... Il y en a tellement...

Oona cherche et se concentre, elle se remémore son enfance pour y trouver la solution.

Qu'aurait fait son grand-père dans une telle situation ?

[Oona]

Après moult réflexions, elle se rend compte qu'elle n'en sait absolument rien. Jamais au court de sa courte vie elle n'avait vu quiconque autour d'elle être confronté à ce genre de situation.

Elle doit donc soit se debrouiller seule, soit demander à quelqu'un de plus compétent. Cependant, par fierté et parce qu'il s'agit de son défi, elle ne demandera rien à personne... Du moins pour l'instant.

Elle se reconcentre alors sur sa tâche, et reflechit à son rêve. La solution doit être là, à porté d'esprit. Elle se remémore sa rencontre avec l'esprit, et sa discussion avec lui. Et puis soudain, dans un accès de curiosité, elle se demande s'il n'y aurait pas effectivement un esprit qui veille ici, mais du côté Umbrale.

Posant ses "outils", elle tente de se decaler pour voir à quoi ressemble le coin de l'autre côté.

[Machuthu]

Oona se décale, ce qu’elle aperçoit alors n’est que désolation… Les esprits ont fui ce lieu. Nul animal ne vient plus s’y désaltérer, nul oiseau ne survole la zone.

En proie au désespoir, Oona ferme les yeux un instant lorsqu’une douce voix rocailleuse charme ses oreilles. Voilà des années qu’Oona n’a plus entendu la voix de sa grand-mère et la voir là, debout devant elle lui procure un immense plaisir. D’un geste lent, plein de tendresse la vieille femme caresse la joue de la jeune femme.

Bonjour, fille de lune…

Les esprits se joueraient-ils de toi ?

[Oona]

Oh...

Oona ne peut s'empêcher de laisser échapper un tressaillement. Ses jambes tremblent même un court instant sous l'émotion. Elle finit par se reprendre, même si l'émotion perce dans sa voix :

Oh, Grand-Mère... ! Oui, ils se jouent de moi... C'est une tâche bien compliquée pour une jeune femme comme moi. Comment arriver au bout de tout ça, sans aide, seule ?

Je ne sais que faire...

Devant l'esprit de sa grand-mère, Oona laisse percer le désespoir qui se cache au fond de son cœur. Cette peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas pouvoir agir, d'être faible face à l'ampleur de ses devoirs ne couvre pas que son défi actuel, mais également sa tâche d'alpha et son destin de Garou.
Bien qu'elle ne l'ait pas vraiment laissé paraître, et qu'elle ait tenté de se montrer forte, cachée au fond d'elle, son âme de jeune fille est terrifiée.

[Machuthu]

Sa grand-mère s'assoit et entraîne la jeune femme avec elle, l'incitant à s'allonger et à poser sa tête sur ses genoux, comme elle le faisait étant petite. Elle commence alors à la coiffer et à la calmer.

Les esprits sont partis et tu dois les faire revenir... Si je me souvient bien ta voix était claire et ton chant harmonieux. Chante pour l'étang, mets y un peu de ton âme et tu verras, les esprits viendront... Ils sont toujours venus... Ils se rappelleront le temps d'autrefois où ils fréquentaient cet endroit et tous ensemble, ils t 'aideront...

Que la vermine remonte jusqu'à la vase pour en faire du terreau, que l'arbre plonge ses racines dans cette terre riche et que les animaux broutent les branches tombantes qui stagnent dans l'eau... Alors, jolie Oona, l'étang de nouveau vivra...

Tu es d'un peuple qui toujours honora les esprits... Ceux-ci ne l'oublieront pas...

Le visage de la grand-mère se voile un instant de tristesse.

Je sais petite Oona, ce qu'il coûte d'être une fille de la lune. Je sais que ta blanche fourrure fait de toi l'héritière de notre lignée et que beaucoup te font confiance. Je sais enfin que tu ne veux pas les décevoir malgré le peu d'expérience dont tu disposes mais de là haut mon âme maintes fois t'a contemplé... Sache le, petite fille de mon coeur, jamais un de tes pas, jamais un de tes gestes ne m'a déçu...

Allons, chante avec moi maintenant...

La vielle femme entonne doucement un chant ou Oona sent encore percer l'émotion de cette tendre déclaration.

Oh, esprits qui jadis animèrent ces lieux...
Oh, vous qu'autrefois j'ai défendu...
Aujourd'hui une nouvelle fois j'en appelle à vous...
Mon enfant, la chair de ma chair se tient là et pleure...
Elle pleure de ne pas pouvoir vous rendre ce qui fut...
De votre aide elle a besoin...
Seule la laisserez vous ?

Continuant à chantonner, sur les vieux rythmes indiens, la vieille femme plonge son regard dans celui d'Oona, l'incitant à prendre part à son tour à ce chant d'appel.

[Oona]

Depuis longtemps, Oona n'avait pas eu un tel moment de tendresse. Sa vie qui semblait s'emballer et la mener sur des chemins tortueux et violents ne lui avait permis que peu de réconfort. Mais maintenant, sa Grand-Mère était là. Elle était là et la rassurait, la réconfortait.
Ses paroles réchauffent le coeur de la jeune fille, et elle sent le courage revenir, le force de faire son devoir de nouveau s'emparer d'elle.

Avec cette énergie regagnée, la petite Uktena entreprend de suivre son ancêtre dans ce chant d'appel. Elle commence doucement, puis s'y met totalement. Elle déploie tout son talent et y met toute son âme.

Elle effectue une petite variation pour que le chant lui corresponde plus :

Oh, esprits qui jadis animèrent ces lieux...
Oh, vous qu'autrefois mes ancêtres ont défendu...
Aujourd'hui, j'en appelle à vous...
Descendante de ces glorieux aïeux, je me tiens là et pleure...
Je pleure de ne pas pouvoir vous rendre ce qui fut...
De votre aide j'ai besoin...
Seule me laisserez-vous ?

[Machuthu]

Vibrant d'une émotion réelle, le chant de l'Uktena se répercute sur les arbres alentours et la curiosité des animaux attire bientôt les esprits jusqu'à l'étang...

Alors qu'un couple d'oiseau se pose devant la gaillarde sautillant en adressant à l'indienne un regard interrogateur, une biche vient poser son museau sur l'épaule de celle-ci alors que l'ombre fraiche d'un saule caresse sa joue.

Le saule prend la parole et s'adresse à la jeune femme.

Quel est donc cette chose qui te rend si triste ? Que ne peux-tu nous rendre qui fut ?

[Oona]

La jeune femme lui répond alors, avec une voix emplie de respect :

Il y a longtemps, cet étang devait respirer la vie. L'eau s'écoulait, les arbres poussaient, les animaux venaient étancher leur soif ici, ou prendre un peu de repos.
Il a longtemps, Gaia avait pleins droits ici. Et l'endroit devait être resplendissant, calme et apaisant. Aujourd'hui ? La corruption règne et plus rien ne vit ici. C'est la désolation.

Et moi ? Moi je suis là pour rendre à ces lieux sa beauté d'antan, je suis là pour redonner à Gaia la possibilité de s'exprimer, et d'afficher ses belles couleurs. Mais je ne peux y arriver seule...

Et c'est ça qui me rend triste. Je pleure de ne pouvoir rendre à cet endroit sa pureté. Pourtant je le veux. Et j'y passerais ma vie s'il le fallait...

Oona clos sa tirade en baissant un peu la tête, plongeant son regard vers le sol et attendant la réaction du saule ou des autres esprits.

[Machuthu]

Le saule se penche un peu plus et d'une voix douce il poursuit.

Si tu ne peux entreprendre cette tâche seule alors je t'aiderais. Je plongerais mes racines au plus profond de la vase pour en changer la forme et faire de cette boue impropre des feuilles qui à la prochaine saison tomberont pour former du terreau.

Les oiseaux qui nichent en mes branches nettoieront la surface de l'étang de chaque brindille afin de contruire leur nid et peu à peu, cet étang retrouvera la vie...

Gaïa est de toute éternité jeune fille de la lune... Le temps ne lui est pas compté et avec ton aide et la notre, elle reprendra ses droits sur cet étang.

[Oona]

Je te remercie ! Je vous remercie tous.

Répond Oona, adressant un regard à chacun des esprits qui l'entoure. Elle se permet même de passer sa main, tout doucement, sur le museau de la biche qui est à côté d'elle.

Avec votre aide, nous pourrons rendre à Gaia ce qui lui est dû.

Se sentant plus réconfortée, maintenant qu'elle a le soutien des esprits alentours, la jeune louve pose son regard sur sa Grand-Mère et lui sourit.

[Machuthu]

La vieille femme passe une dernière fois sa main dans les cheveux d'Oona et lui sourrit.

Va maintenant, fierté de mon coeur, va aider l'eau à retrouver son chemin... Moi je reste là... Près de toi...

[Oona]

Oona jette alors un nouveau coup d'oeil à l'étang et en fait le tour en détaillant ses bords. Certes, il n'est pas propre, et ne le sera peut-être pas avant un moment. Mais elle sent bien que tout cela s'apprête à changer.
Il fallait encore cependant qu'elle trouve le mince filet d'eau qui lui permettrait de remonter jusqu'à la source, et libérer le courant.