L'autre Vérié : Isaac La Tour

[Machuthu]

Cela fait des mois qu'Isaac est tombé de l'échafaudage, des mois qu'il a rejoint les Uktenas, ces frères, des mois qu'il étudie aux côtés de Théurges de son peuple afin de comprendre l'Umbra et ses mystères, des mois enfin qu'il découvre toute la profondeur du conflit qui oppose les grands esprits...

Depuis tout ce temps, Isaac n'est pas encore parvenu à comprendre ce qui le reliait à Gaïa... Certes, il est un guerrier mais il se sent avant tout natif, natif de ces terres dont les blancs l'ont dépossédé et rien que de repenser à la déportation massive dont ses aïeux ont été les victimes il sent la rage qui bouillonne en lui...

Et puis il y a eu cette mission, celle qui ferait enfin de lui un garou, un membre de la nation, reconnu par ses frères comme un Cliath... Il devait s'agir de convaincre une famille de riches humains, dirigeants d'une chaîne d'usines polluantes, de trouver des solutions améliorant le respect de l'environnement et de refuser de rejoindre le rang des alliés de Pentex...

A la suite de Plume-de-bison, votre alpha, vous vous êtes donc mis en route afin de rejoindre la maison de ces humains, trop riches et trop imbus d'eux mêmes pour comprendre à quels points ils sont une insulte à la création...

C'est à ce moment là que tout a basculé... Dès votre arrivée dans le jardin de cette villa cossue, richement ornée, Isaac a eu un drôle de pressentiment... Il y avait en ce lieu tout ce qui le rebutait... Tout d'abord, des humains, blancs, riches et dédaigneux à souhait, la statue d'un soldat d'antan qui se dressait fièrement au centre du jardin, semblant défier les tribus natives de lui faire face, l'une de ces voitures dont le prix suffirait à nourrir des dizaines d'enfants à vies et cet enchevêtrement d'objets hétéroclites, symboles d'une grandeur passée et de l'époque ou les premières machines permettaient aux patrons de licencier à tour de bras... Tout, donc était réunis en ce jardin pour qu'Isaac sente la rage bondir en lui et pourtant... Pourtant, au fond de lui, à cet instant précis, Isaac eut le pressentiment que sa vie allait connaître un nouveau tournant...

D'une certaine façon et pour la première fois de sa vie, Isaac ressentit la présence des esprits, autour de lui... en lui... Ils étaient là, virevoltant sans cohésion apparente et pourtant, dans la complexité de leurs trajets, Isaac reconnut l'oeuvre d'une intelligence supérieure à tout ce qu'il avait rencontré jusqu'alors... Durant un long moment, Isaac observa cette danse entre chaotique et psychédélique... Ses frères, eux, ignoraient jusqu'à la présence des esprits, Isaac le comprit rapidement, de toute façon, ils n'auraient pas compris... Les esprits, ils s'adressaient à lui, à sa nature profonde, à son essence...

A un moment, Coeur d'Ours entend sont frère Plume-de-bison hurler...

Coeur d'Ours, qu'est ce que tu fous ?

Péniblement, à regret, Isaac rouvre les yeux pour s'apercevoir que ses compagnons sont attaqués par une meute de danseurs de la spirale noire... Le combat est déjà engagé et seul l'alpha, votre ahroun, tient encore debout...

A son tour, Isaac se lance dans le combat et il se jette sur l'adversaire le plus proche de lui... A en juger par les objets qui ornent ses colliers, il s'agit également d'un théurge... Durant de longs instants, les deux meutes s'affrontent mais les danseurs ont l'avantage, d'autant que pour une raison qu'il ignore Isaac a tendance à retenir ses coups... Il a l'impression que le théurge qui lui fait face est à l'origine de cette danse des esprits... La curiosité de l'Uktena l'emporte sur sa rage... Comment se résoudre à tuer un être qui détient les clés de votre propre essence ? Tout cela fascine Isaac et même lorsque Plume-de-bison s'éteint dans un râle, le Théurge n'en ressent pas une tristesse aussi grande que celle à laquelle il s'attendait...

Sur un signe du Théurge danseur, la meute des Blacks Spirals l'immobilisent et son premier adversaire tente de lui parler...

Donne moi ton nom et ta tribu, théurge ?

[Sergeï]

Les sons prononcés par le Parle-esprit qu'il a face à lui semblent traverser un voile d'indolence, de... de plénitude, de calme.

Isaac lève les yeux, se forçant malgré lui à être agressif envers cet être abject, cet immondice du Ver, cet... non cette réflexion sonne faux, ce n'est pas la sienne, mais celle de Plume de Bison qui est là gisant dans son propre sang, le corps lacéré de coups de griffes et autres choses tranchantes...

Coeur D'ours, Uktena.

Coeur d'Ours se surprend encore à fermer les yeux une fraction de secondes, cherchant à ressentir ce vaste monde mystique, et essayant de demander pardon pour la mort de la meute... mais il n'y croit pas... il n'y croit plus.
A présent ses yeux sont levés sur le Danseur, mais il ne le regarde pas, Coeur d'Ours a le regard vide...

[Machuthu]

Le Théurge des Danseurs affiche un dédain clair pour l'indien...

Tu es Uktena... Alors regarde Uktena, contemple toute la stupidité de Gaïa... Vois la bêtise de ceux qui t'envoient à la mort... Et pourquoi ? Pour défendre Gaïa ? Non, pour défendre une famille de blancs... Connais-tu seulement leur nom, Coeur d'Ours ?

Isaac est piqué au vif. Oui, il connaît leur nom, ils se nomment Van Mielen...

Oui, tu connais leur nom... Leur nom de famille, mais connais tu leurs ancêtres ? Sais-tu quel est le nom de jeune fille de cette femme que l'on te demandait de sauver ?

Non, cela tu l'ignores, alors je vais te l'apprendre...

Jeune fille, elle portait le nom de Van Buren... Oui, tu m'as bien entendu... Van Buren, ce nom te rappelle quelque chose Coeurs d'Ours ?

Oh oui, ce nom lui rappelle quelque chose... L'Uktena fouille un instant sa mémoire... C'est un nom qui lui est familier, qui lui évoque un certain dégoût mais Isaac peine à se rappeler pourquoi... C'est le nom d'un président ou de quelque chose comme ça... Oui... Martin Van Buren... Isaac se débat, ce n'est pas possible... Gaïa n'a pas pu... N'a-t-elle donc aucune mémoire...

Ca y est, tu comprends... Tu m'entends n'est-ce pas, tu entends toute la stupidité de Gaïa... Te demander à toi de défendre la descendante de celui qui a chassé tes ancêtres, de celui qui a provoqué leur mort, de celui qui a fait de tes ancêtres des esclaves... à peine plus que des chiens...

Es-tu sûr d'être un loup ? Ne vois-tu pas que Gaïa se fourvoie ?

Le théurge prend une voie plus douce, plus calme...

Réponds moi, crois-tu encore en la sagesse de Gaïa ?

[Sergeï]

Isaac se sent toujours dans une sorte d'indolence, son cerveau semble ne pas vouloir réfléchir... pourtant l'évidence est là...

Je ne sais plus si j'y ai cru un jour...

La pudeur aurait du lui dicter de regarder le tentateur avec mépris, en cherchant à lui cacher son désarroi, et attendre ainsi une mort certaine, cette mort que l'on inflige à un ennemi vaincu.

Mais ce qui se passe là, en ce moment n'est il pas un indice qui lui prouverait que sa vrai renaissance serait dans l'autre camp, comme si Gaïa n'avait voulu lui montrer qu'une seule et unique chose:
Qu'il n'était pas un de ses gardiens
Il était évident que le Théurge avait senti en Isaac le doute.

"Isaac La Tour" ce n'est pas moi, "Coeur d'Ours" ça n'est plus moi, si toutefois ça l'a été un jour, Alors qui suis-je ? quelle est ma place alors...?
Ca n'a plus d'importance, je vais mourrir. Quelle ironie, le jour où j'ai rencontré ceux qui détenaient la vérité...

Coeur d'Ours commence à sourire, ce qui précéda un rire silencieux faisant seulement remuer sa cage thoracique. Son regard lui est seulement triste. Faisant ressortir toute son amertume accumulée au cours de sa vie... lui qui d'une certaine façon a toujours été un paria.

[Machuthu]

Le théurge des danseurs adopte un ton plus clément, presque compatissant...

Je sais l'ami... Je comprends ce que tu ressens... Nous avons tous voulu y croire à un moment ou à un autre... Heureusement, nous avons fini par ouvrir les yeux...

Es-tu prêt à ton tour à ouvrir les yeux ? Es-tu prêt à examiner avec le recul nécessaire le combat que mène Gaïa depuis des millénaires ? Es-tu prêt à juger avec des yeux neufs, libérés de cette contrainte d'être comme les autres ? De ne pas être seul ?

[Sergeï]

Sans arrêt j'ai vu Gaïa céder du terrain face à l'avenir, plus des frêres tombaient moins je comprenais comment ceux qui restaient pouvaient avoir autant la foi dans celle qui ne représentait pas ou plus la force.
Sans arrêt j'ai voulu combattre le Ver car à mes yeux il détruisait cette merveilleuse terre par la corruption.
Sans arrêt j'ai haï l'homme blanc d'avoir détruit mon peuple
Sans arrêt je me suis haï...
Sans arrêt j'ai voulu savoir où était ma place !

La vérité était tellement plus simple, le Ver ne créait pas le chaos par plaisir, il savait !! il savait qu'il fallait détruire pour reconstruire.
Il savait que Gaïa était malade...
Et lui il m'a laissé faire mes erreurs, il voulait que je comprenne par moi-même l'évidence de ce monde: il faut qu'on l'aide à changer car il ne peut changer seul... mais Gaïa la Folle s'y oppose et jalouse le Ver...


Isaac semble reprendre ses esprits.

Je crois que pour la première fois de ma morne existence, je suis prêt à rejoindre une cause avec enthousiasme...

Cependant, je ne regrette pas d'avoir combattu aux côtés de ces soldats de Gaïa, elle est à condamner, pas eux, ils n'ont fait que combattre pour une chose qu'ils croyaient bonne, c'est juste qu'ils ne croyaient pas à la bonne chose...

[Machuthu]

Le Théurge baisse les yeux et fait signes aux autres de le lâcher...

Je comprends ce que tu dis petit-frère mais ce sont nos adversaires les plus farouches... Nous ne pouvons les laisser agir...

Toi qui a vécu parmis eux, tu dois me comprendre... Tu sais à quel point Gaïa les corromps avec le temps... Au plus ils avancent dans le temps au plus ils obéissent aveuglément à Gaïa entrînant chaque jour un peu plus leur perte...

Lèves toi maintenant... Ton heure n'a pas sonné... Tu as compris de nombreuses choses aujourd'hui...

Bien, puisque tu es prêt à nous rejoindre, il me semble justifier de faire quelques présentations...

On m'a donné le nom de Crève-le-voile et voici ma meute...

Crève-le-voile te présente un à un ses companons... Chez chacuns d'eux, Isaac ressent la force de la bète, cette rage puissante qui transparaît dans leur moindre mouvement... Ce sont de véritables prédateus, pas de simples jouets d'une puissance supérieure...

Allons, explique moi, petit-frère... Conte moi ton histoire avant que je ne te mène vers ta nouvelle famille...

[Sergeï]

Isaac obéit au Théurge et commence alorsà réunir quelques brindilles auxquelles il met le feu, autour de ce tout petit feu plus représentatif qu'efficace, il dispose quelques coquilles de noix, et dépose dans la coquille de noix vide quelques gouttes récupérées d'une plante cueillie près de lui.
L'Uktena sort également une bourse de cuir dans laquelle est contenu du tabac à l'odeur enivrante et quelques feuilles de plantes étranges, Isaac semble suivre un rituel bien particulier dans la confection de ce qui semble représenter un calumet de la paix de fortune
Enfin Isaac récupère son Tomahawk et son Arc. Il les dispose au sol devant lui, et se met en tailleur, invitant les Danseurs, ses nouveaux frêres, à se joindre à lui et à prendre une position similaire.


Nous les Indiens croyons au monde des esprits, ce qui d'une certaine façon peut nous faciliter la compréhension de celui-ci lorsque nous devenons Garou ou Danseur.

Isaac désigne sa construction intrigante
Il doit souvent y avoir un hommage aux quatre éléments, la Terre représentée par cette coquille, l'eau représentée par le jus de la plante, le feu représenté par lui-même et l'air représenté par la fumée du feu.
Ensuite une fois que nous avons remercié la vie, il faut montrer notre cohésion, et puisque je suis peut être en passe de rejoindre votre famille, j'ai confectionné ce calumet de fortune, si vous m'acceptez alors fumez et tendez le moi à la fin je fumerai en dernier, sinon je ne fumerai pas.


Isaac tend le calumet au Théurge et commence son récit...

Le peuple Cherokee vivait sur la future Amérique depuis des millénaires, et plus de 70 tribus Cherokees vivaient en paix.
Puis l'hommes blanc est arrivé en 1540 sous le nom de Hernando de Soto, un hispanique, corrompu par la civilisation de l'homme blanc, amenant ses maladies de blanc, sa corruption ed blanc.

A partir de là le Visage pâle a vu en notre terre Nourricière une grande opportunité de richesse et a commencé à exproprier mes ancêtres, petit à petit.

En 1835, un de mes ancêtres, au coeur indomptable, Coeur d'Ours fut déporté comme 20 000 autres indiens par l'Homme blanc car les terres que mes ancêtres occupaient l'intéressaient et étaient parmi les plus belles. Cette Volonté venait du Président de l'époque Martin Van Buren, aïeul de l'une des personnes vivant sur la propriété que nous devions protégé ce soir.
Suite à ce déplacement qui nous arracha de nos terres, mon peuple perdit encore plus son identité car certains des nôtres furent baptisés et leurs noms Indiens et croyances originelless abandonnés.
Le Visage Pâle voulait nous assimiler, nous faire plier sous ses lois qu'il ne respectait pas lui-même.

Quelques générations plus tard, et après que Coeur d'Ours soit devenu Isidore La Tour, est né un petit Cherokee, appelé Isaac. Son Tempérament indomptable, son aspect solitaire lui valurent de recevoir le nom de son Ancêtre "Coeur d'Ours" et cet enfant, moi-même, hérita de la haine de son arrière-grand père pour ce qui gangrénait sa Terre.

J'ai travaillé pour des hommes blancs qui exploitaient d'autres blancs sans vergogne, et qui avaient encore moins de considération pour ma race.
J'ai massacré un homme qui voulait s'en prendre à une enfant...
J'ai massacré un de ces patrons gros et gras se vautrant dans leur société de blanc et leur argent pourri.
J'ai tué pour mon identité perdue, mais une chance m'est donnée de tuer pour le Ver ce soir, ma vie a un sens... et je crois que je l'ai su avant même le combat lorsque j'ai senti tes esprits tournoyer autour de moi

Désormais, je sais que la seule alternative qui me reste est de détruire notre Terre afin de la remodeler et de lui donner un nouveau départ, chassant et détruisant par la même occasion l'Homme Blanc, ce sera pour moi l'occasion de venger les miens... et de reprendre leurs terres !

Le regard d'Isaac reproduit sans équivoque un regard éteint malgré la passion qui l'anime. Le regard du tueur psychopathe parfaitement conscient de ses actes, qui ne trahit pas la folie mais qui commet un acte d'une barbarie extrême, ce regard qui impressionne par la froideur qu'il dégage, le malaise qu'il peut créer...Ce regard exprimant une logique implacable sans émotion.

[Machuthu]

Le Théurge observe les différents éléments du rituel et prend le calumet, en fume une bouffée et le passe à son voisin, l'ahroun en question, tire lui aussi une large bouffée, une seconde puis indécis passe le calumet à son voisin, de toute évidence, il s'étai attendu à un peu plus de goût...

Pendant ce temps, le théurge commente...

Oui... Les blancs... Ils voulaient tout régir, tout légiférer, imposer leur loi à la terre elle même... Aujourd'hui encore, ils continuent leur oeuvre, ils sont les fidèles bâtisseurs de la tisseuse... Mais devant l'ampleur de la folie de la tisseuse, les hommes ont commencés à ouvrir les yeux... Nombreux sont ceux qui se sentent désespérés dans ce système rigide qui ne leur correspond pas et ceux là finissent par comprendre que nous sommes les seuls à pouvoir les aider, les seuls à pouvoir faire table rase...

C'est pour ça que le Ver est si présent au coeur des villes... La folie de la tisseuse réveille les hommes et même s'ils n'en ont pas toujours une conscience nette, beaucoup oeuvrent en notre faveur...

Durant ce temps, le calumet a achevé son tour et revient à Coeur d'ours...

[Sergeï]

Lorsque Coeur d'Ours reçoit le calumet, ce dernier commence par se taire.


Après le cycle de ce calumet passé de mains en mains mon ancienne tribu, ce calumet passe de mains en mains avec cette nouvelle tribu.

le cycle s'est achevé et un nouveau commence. Les herbes que nous fumons nous aident en temps normal à atteindre le monde des esprits, et pour forcer un peu les choses, chez nous les indiens, nous chantons et dansons jusqu'à atteindre l'autre monde...

Je suis prêt à Danser...

[Machuthu]

Le théurge abaisse la tête en signe d'acquiescement et se lève...

Alors, il n'y a pas de temps à perdre... Ce soir tu connaitras ta première danse...

Suis-nous...

Sur ces quelques mots, le théurge s'élance, bientôt suivi de sa meute...

(hrp : Rendez-vous sur le sujet : La ruche. )